La folie Nintendo Labo s’est emparée de mon foyer
J’ai construit un canon, un oiseau, un piano ! Des heures d’amusement menant au plus terrible des dilemmes : une partie de Tetris in real life, morceaux qui disparaissent inclus. Je fais quoi de tout ça, maintenant ?
J’adore la réalité virtuelle. Rien d’étonnant venant d’une folle qui a importé un Virtual Boy avec l’un de ses premiers salaires et qui possiblement possède six 3DS. Le PSVR c’est de la bombista-bomba, vouloir continuer l’aventure avec Nintendo était pour moi plus que tentant. Il faut néanmoins une bonne raison pour justifier les 60 € nécessaires de ce kit que tout le monde annonçait comme de la « VR en carton *rires enregistrés* » : je remercie donc mon enfant d’être née, mais surtout d’avoir l’âge nécessaire pour manipuler ce carton car, bon, ce n’est définitivement pas pour moi, mais pour elle.
Je n’ai besoin de personne avec mon kit Harrington
J’avoue, vous ne l’avez pas encore deviné, mais c’est avant tout pour ma propre curiosité que je me suis procurée le Nintendo Labo VR Kit sorti peu avant les vacances scolaires d’avril 2019. Étant de nature faible et quelque peu égoïste, c’est avec avidité que je me jette sur le colis à peine reçu, le déchire de toutes parts et en récupère le Saint Graal : du carton. Ainsi qu’une cartouche de jeu, il ne faut pas déconner non plus.
Excitée, je m’attelle à la première construction que le jeu me propose. Qu’est-ce donc ? La forme s’enlève de sa plaque cartonnée avec un craquement satisfaisant. Je range soigneusement le reste dans le paquet et suis les instructions, rêveuse. Un nouveau monde s’ouvre à moi, la magie Nintendo opère, le résultat s’annonce incroyable. Je retombe en enfance et finis rapidement… un porteur de Joy-Con. Une boîte dans laquelle on met sa manette, si vous préférez. C’était le tutoriel. Je l’aurais su si j’avais lu l’énoncé. Un mois et demi plus tard, je n’ai toujours pas la moindre idée de son utilité.
Heureusement que le programme me propose de me mettre directement au gros du produit : les fameuses lunettes promis-ce-n’est-pas-Google-Cardboard. Le montage se montre facile, bien que fastidieusement long, avec en bonus la petite pointe de honte de faire tout ça sans la destinataire officielle du produit. Tant pis, je trouverai une excuse. Le front suintant, les mains moites, je reste patiente face à l’adversité, pliant méthodiquement chaque coin, coupant en suivant les pointillés chaque morceau. L’aventure fut périlleuse, mais je peux enfin profiter du fruit de mon labeur après 30 interminables minutes.
Je n’ai pas de mot pour décrire ce que je ressens quand je mets mon nez dans ce mélange de papier mâché et de plastique.
En fait si, j’en ai. Ça fonctionne. J’ai en face de moi une véritable image en réalité virtuelle. Un personnage tout blanc, probablement l’effigie d’une marque de céréales, me fait face avec ses formes abstraites composées de cylindres et de cubes. Je tourne sur mon lit, la caméra suit le mouvement. Ça fonctionne. J’ai beau avoir fini le fabuleux Astro Bot en janvier dernier ou secoué la main de Doraemon sur Oculus Rift à une ancienne édition de Japan Expo, je suis amoureuse.
Des objets tombent soudainement du ciel. Je lève la tête, suis leurs mouvements et rebonds. « Bienvenue dans Nintendo Labo VR ! » peut-on lire. Sur les blocs, se trouvent des instructions qui se résument à « Appuyez sur toutes les touches ! ». Le protagoniste virevolte, des boîtes mystères issues de Mario apparaissent. Le décor n’a beau être qu’une plaine sans fond, je suis subjuguée par le résultat. La faible Switch à l’écran sous-HD et au faible rafraîchissement produit une VR plus que convaincante, bien qu’un peu pixelisée. Ça fonctionne, bon sang !
Une enfant en carton
Qui aime bien châtie bien, je ressens quand même le retour de bâton dès qu’elle saura lire… Disons avec politesse que la présence d’un adulte est vitale si vous ne voulez pas voir vos dizaines d’euros finir en cabane Peppa Pig. Maintenant que la garderie l’école n’assure plus son job, Nintendo prend le relais. Quelles vacances nous passons ! Au-delà de ses horaires assez proches de ceux d’un pompier d’astreinte, ce sont surtout des journées incroyables de constructions dont nous profitons. L’oiseau, la pédale (sur laquelle appuyer, pas moi), l’éléphant ! Tout s’enchaîne avec une facilité croissante. « J’ai vraiment l’impression que je suis vraiment dedans ! » s’exclame ce petit énergumène de six ans en traversant les cieux à la recherche de fruits pour ses poussins. Elle n’a, jusqu’ici, jamais voulu essayer un de ces casques qu’elle juge trop effrayants. L’effet relief de la 3DS lui fait mal aux yeux. La VR du Labo, elle, la conquit instantanément.
En tant que véritable gameuse, ce qui m’intéresse avant tout est évidemment de tirer sur des choses. Le canon est donc ma priorité, il m’excite véritablement. C’est pourquoi elle a décidé que nous le construirons en dernier.
Il se trouve que c’est surtout le plus compliqué à faire, mais également le plus impressionnant. Quelques élastiques, des autocollants reflets que la caméra du Joy-Con droit repère et me voilà avec un fusil à pompe assez bruyant. Les ennemis arrivent de partout et les portes coulissantes Metroid cachent des boss arborant un grand œil de Gomorra façon Zelda. Avancer dans le jeu ne fait qu’accentuer mon désir de lancer ma propre pétition pour un House of the Dead VR. La Switch suit étonnamment bien les rotations rapides, quelque soit leurs directions à quelques degrés près. Le grand méchant final vous demande d’ailleurs de tourner dans tous les sens, je ne vois absolument pas comment le gosse des pubs assis sur sa chaise s’en sort. C’est du mensonge du même niveau que les burgers de McDo.
Les mini-jeux du pack pourraient définitivement être plus étoffés, une petite heure en ligne droite pour chaque. Néanmoins, combiner trois Joy-Con pour naviguer son oiseau est un plaisir sans fin, nous avons là le meilleur équivalent prolétaire des multiples accessoires que reçoivent inévitablement chaque console.
J’aurais pourtant voulu voler au-dessus de l’Île Wuhu, qui est un peu le triangle des Bermudes de Nintendo depuis sa dernière apparition en 2013 dans WiiFit U. Oui, je sais qu’on s’y balade en 3D dans Pilotwings, mais pas sur grand écran avec des ailes et une pédale géante (l’objet, pas moi, j’insiste).
L’expérience inédite de tous ces objets insolites, sans compter la rejouabilité des jeux (scores, défis…), le labo de construction, les modes multijoueur, font qu’on en a amplement pour son argent. Nintendo a même proposé quelques micro-jeux en téléchargement, comme une simulation de Godzilla ou un tape-taupe. Je les remercie profondément, car les concevoir soit-même relève de l’impossible. Le système de développement est un véritable casse-tête arborant un design noir et blanc qui est tout sauf ludique. On n’est pas en face du nouveau Little Big Planet, Project Spark ou Dreams, c’est évident.
Et là, c’est le drame
On s’est bien amusées, ma fille n’a pas été trop bête, tout va bien. Je range OÙ toutes ces choses, maintenant ? Bienvenue dans le monde des adultes, j’en fais des crises d’angoisse. Vous avez pensé au chat qui fait partout ? À l’humidité ? À mes maladresses de pingouin ?! Aucune caisse de rangement en ma possession ne peut contenir ces multiples gadgets ! Le canon prend une place monumentale, ne faisant évidemment germer dans mon esprit aucune blague phallique (bien sûr que si). Une seule solution s’offre donc à moi : me procurer le pack Nintendo Labo 1. Ma fille veut absolument faire du piano.
Les lunettes de base trouvent finalement domicile dans un sachet isotherme. Le reste finit dans un grand caisson en carton recouvert d’un drap pour le moment. Ma stupidité n’est pas si grande que ça, je commande dans le même temps une grande malle en plastique chez un revendeur professionnel et adore recevoir, trois jours plus tard, un pot à fleurs géant. Une petite personne m’avoue qu’il s’agit d’une poubelle géante dans laquelle il faut me jeter. Soit. Tout ça se finit avec encore un achat (*soupir*), celui de malles en tissu aux tailles extravagantes. Quant au nouveau kit Labo, fort de notre expérience avec le premier-qui-est-en-fait-le-quatrième, on se jette dessus tout en joie.
On ne m’y reprendra pas : j’ai bien lu l’énoncé initial, cette fois-ci, il nous a redemandé de faire un porteur de Joy-Con absolument inutile. Jamais de la vie !
Après avoir construit pour la deuxième fois cet objet, vient donc le fameux piano. Sans aucun cynisme, avec surtout beaucoup de franchise, qu’est-ce que c’est chiannuyeux ! On aurait dû s’en douter, cet instrument est doté de plein de boutons et quelqu’un doit bien les construire. Au bout de deux, c’est bibi (la grande pédale, moi) qui doit s’y coller. Les autocollants réfléchissants que la caméra utilise comme repères pour jouer les sons s’enchaînent. Les pliages et emboîtages s’empilent pour un résultat assez mitigé. Les touches sont branlantes, menacent d’aller voir ailleurs au moindre faux mouvement. La progéniture reste convaincue, la mère beaucoup moins. Les couleurs que prennent mon visage quand je la vois tambouriner sur la machine fait d’onéreux carton, je ne vous raconte pas… Ne me dites pas que vous ne faites pas une crise cardiaque en regardant cette vidéo (coupée brutalement par mon propre arrêt).
Nintendo a eu mon petit cœur d’amour, Labo c’est bien. Ne vous procurez pas l’objet pour l’expérience Mario Odyssey VR ou Zelda Breath of the Wild VR. Les deux ont été de toute évidence produites par deux équipes ayant choisi des approches différentes avec une limite de temps similaire. Le plombier vous propose un mini-jeu brouillon d’un ennui mortel, et le héros androgyne présente le titre complet fortement zoomé et flou. J’avoue être fan du dernier, à condition de ne pas bouger la tête. Les rotations sont liées au stick droit au lieu d’un vrai système de caméra de réalité virtuelle. Pour le reste, ça rame un peu, mais ça reste particulièrement fun. Problèmes techniques dus à une contrainte temporelle, de toute évidence… Il fallait sortir à temps une vitrine technologique pour vendre le pack aux gros joueurs après les échecs des précédents !
Nintendo Labo prend beaucoup de place et peut être redondant à construire, mais l’amusement est définitivement présent. Je crois que nous avons néanmoins toutes les deux eu notre dose : aux dernières nouvelles, il faut laisser à la petite cousine le soin de construire les prochains jouets. J’ai l’air bien bête avec le Pack 3 qui arrive bientôt dans ma boîte aux lettres…
Marynou