Test : Saints Row: The Third (Switch) fait les saintes-nitouches
Retour vers le passé : le hit de 2011 débarque sur Nintendo Switch dans un format tout aussi portable que poussif. Je sais, ça ne veut rien dire, moi je vous retranscris ça pèle-mêle !
Huit longues années nous séparent de la sortie originale du jeu Saints Row: The Third sur Xbox 360 et PlayStation 3 et sa version chez la marque historiquement familiale. Nous en avions dit beaucoup de bien à l’époque pour de multiples raisons, mais le marché du jeu vidéo a énormément changé entre-temps. L’épisode 4 est disponible, GTA V aussi et l’explosion du jeu mobile a donné naissance à de multiples portages ou clones de ce dernier. Reste-t-il de la place pour papy Saints Row III ? Oh que oui, c’est juste qu’il aurait pu s’habiller un peu mieux !
Tu lui donnes encore le Saint ?
Soyons honnêtes, la série m’est passée sous le nez jusqu’à maintenant à cause de la réputation de « GTA du pauvre » qu’elle a pu avoir dans les années 2000. C’est sûrement parce que je travaillais dans un Micromania au moment de Saints Row II et qu’il était bien difficile de convaincre les clients s’y intéressant. Il avait beau y avoir un peu de folie trouvable nulle part ailleurs, les discussions terminaient toujours pareil : c’était un GTA pour ceux qui n’en avaient pas eu assez avec le IV sorti quelques mois auparavant. Cette ribambelle d’avis relativement négatifs, cette idée de clone misant tout sur son humour décalé ont fini par me marquer définitivement.
Pourtant, Saints Row: The Third est bien l’opus qui a permis à la série de se démarquer, récoltant les éloges de la presse et des joueurs instantanément. On en comprend rapidement les raisons en le démarrant. La création poussée du personnage va au-delà de tout ce à quoi on s’attendrait pour un jeu de ce genre, en incluant des pistes de voix féminines et masculines pour l’intégralité des dialogues. Les costumes sont affublés de jeux de mots et d’expressions douteuses assez rigolotes, bien que potentiellement gênantes (la taille de la poitrine est nommée Sex Appeal) et le jeu s’ouvre d’office sur une scène d’action enivrante impossible dans un GTA.
Le scénario est à l’inverse de ce que propose la série de Rockstar : bien que les deux vous demandent souvent de partir de zéro pour envahir un maximum du territoire, les protagonistes ne disposent quasiment d’aucune profondeur psychologique. Pas de séance mafieuse chez le psychiatre, on est là pour être le maître (ou la maîtresse !) à grand renfort de remarques graveleuses. Les forces de l’ordre sont étonnamment peu fréquentes, nous laissant rouler dans tout ce qui bouge sans vraiment de limite. C’est la folie pure, un parti pris qui fonctionne et démarque le jeu de sa concurrence.
On la rencontre d’ailleurs très rapidement, après un saut improbable d’un avion. Alors qu’on instaure notre organisation Saints Row (soit : combattre des prostituées à talons hauts et machine guns dans un jacuzzi et voler une banque pour financer un film en notre nom), quelques faits un peu surréalistes intriguent les membres du clan, à commencer par un homme à la carrure et à la force proches de Donkey Kong accompagné de policiers corrompus. Ces derniers ne sont certes pas si rare que ça, mais le personnage de Nintendo est, lui, normalement fictif ! Derrière cette résistance surréaliste se cache le Syndicate qui servira d’antagoniste principal pour le reste de l’histoire, motivant la guerre de territoire au centre de l’intrigue du soft.
Qu’importe si le scénario a la profondeur de mon cerveau, il en a aussi la subtilité ! Le jeu enchaîne avec brio des scènes d’action si rocambolesques et excitantes qu’Hollywood ne saurait les renier. Les doublages, de très bonne facture, fonctionnent surtout quand il s’agit de dialogues humoristiques, ce qui n’est pas pour me déplaire. Un peu lourd et gênant, certes, mais le public adolescent visé ne peut que tomber amoureux du tout. Le titre regorge de contenu annexe tout aussi farfelu que le reste, jamais la violence n’a été montrée de manière aussi détendue, au point d’en être parfois dérangeant. Saints Row III n’est pas un énième clone de GTA, j’ai bien appris la leçon !
Cachez-moi ce Saint que je ne saurais voir !
Mon ordinateur est tombé en rade le mois dernier. Le CPU, la carte mère, la carte graphique… Le point de non-retour pour ma Rolls-Royce achetée en 2011, l’année de sortie de ce jeu, a été atteint. C’est en réinstallant Steam sur ma nouvelle machine que je me suis aperçue que je l’avais également dans ma liste, en plus des trois autres, probablement grâce à l’achat spontané d’un bundle « pour jouer plus tard ». Ce n’est pas la version avec ses DLC nommée The Complete Package (qu’on pourrait traduire par « L’Appareil Complet », et par « Appareil » je parle bien sûr de [ROOH]). J’ai préféré jouer à la version Switch avant de le revisiter avec un outil moderne, et avec le recul je peux avouer que je ne m’attendais pas à un tel écart.
Soyons directs : le portage n’est pas très réussi. Ce n’est en rien la catastrophe du siècle (la palme revient à ARK: Survival Evolved), on a juste l’impression qu’ils auraient pu y accorder un peu plus de temps. Nous avons d’abord les détails anodins : le son qui saute ou s’arrête aléatoirement, qu’il s’agisse des dialogues, bruitages ou musiques. Nous avons aussi quelques voitures qui se bloquent contre des murs, des poteaux… des choses que je n’ai justement pas retrouvées sur la version PC. On finit par développer une sorte d’instinct nous poussant à éviter les situations qui pourraient déclencher ce type de bug, briseur d’ambiance par excellence… mais on fait avec.
Puis nous avons les problèmes difficilement tolérables, en particulier des ralentissements intempestifs et répétés. Ils ne suivent pas une logique facile à deviner : certaines actions tendues tournent relativement bien, pendant qu’une simple course dans une ruelle vide atteint une fraction du framerate normal. Rouler est en fait l’exemple parfait des limites du moteur sur Switch : on a l’impression que le véhicule passe des vitesses constamment. On accélère, ralentit, accélère… sans fin. Les virages deviennent difficiles à négocier à cause d’une animation qui ne sait pas à quelle vitesse aller. Le slow-motion est toujours d’actualité, Matrix a fait des émules !
Puis vient le clipping incessant de pans entiers du décor. On ne parle pas de touffes d’herbes, mais d’arches surplombant des ponts ou d’immeubles apparaissant à dix mètres du joueur. La route de base et ses obstacles majeurs sont présents constamment en contrepartie, ce n’est que le reste qui est accessoire. Le jeu accuse pourtant son âge graphiquement. Bien qu’il reste joli, on est loin d’une pépite graphique. Sur une machine arrivant à faire tourner Doom ou Warframe, c’est assez étonnant…
Si votre plaisir de jeu n’est pas achevé avec tout ça, la latence des contrôles finira le travail. Les sticks répondent avec un retard évident, si bien qu’on se croirait sur la lune. Les boutons d’action ne sont pas aussi réactifs qu’on le souhaiterait. Il faut constamment prévoir nos actions à l’avance, l’improvisation de véritable dernière seconde n’est pas permis… et ce, perpétuellement du début à la fin du jeu. La visée est insupportable et aucune option gyroscopique ne vient aider le tout. J’entends la question d’ici : non, ce n’est pas mieux en mode TV, c’est même pire.
L’excellence de Saints Row: The Third n’est plus à prouver. Bien qu’ayant un peu vieilli sur bien des aspects, la recette fonctionne toujours et on aurait tété le Saint avec plaisir, si ce n’était pour un aspect technique suffisamment aux fraises pour nous gâcher le plaisir de jeu. J’ai eu la (mal ?) chance de pouvoir comparer avec une version de l’époque pour m’apercevoir du désastre. Des ralentissements ou un faible clipping peuvent être compréhensibles, qu’ils soient constants ne l’est pas. Les problèmes audio et de contrôle n’ont pas lieu d’être, également. C’est donc avec prudence qu’on vous redirige vers ce classique assez amoché par son transport sur Switch.
Marynou
Points forts :
– Relativement joli
– Beaucoup de contenu
– Dialogues de qualité
– Plein d’imagination et de possibilités
– Loufoque
Points faibles :
– Ralentissements intempestifs
– Clipping
– Bugs audio
– Grosses latences dans les contrôles
– « Complete Package » auquel il manque quelques DLC
LA NOTE : 11/20
LA NOTE : 11/20
Développeur / Éditeur : Deep Silver Volition / Koch Media
Genre : TPS, Open-world, simulateur de blagues douteuses
Supports : Switch (testé), PC, PlayStation 3, Xbox 360
Date de sortie : 10 mai 2019