Test : World’s End Club Deluxe Edition (Switch)

Les géniaux créateurs de Danganronpa et Zero Escape, ainsi que leurs équipes, s’associent à nouveau pour nous livrer World’s End Club (PS4, Switch), un mélange de visual novel et de plateforme sorti en partie sur iOS fin 2020. Ce nouveau jeu est-il une nouvelle pépite ? Des éléments de réponse, sans tarder.

Rejoignons le Club des Battants

Une bande de petits japonais de 12 ans, encore en primaire, est liée par une très forte amitié et a décidé de fonder le « Club des Battants » pour symboliser les sentiments forts qui les unissent. Partis en voyage scolaire, un objet étrange considéré comme un météore est aperçu juste avant que le bus qui les transporte n’ait un accident. Les enfants se réveillent alors dans des capsules, au fond de la mer, et doivent participer à un jeu de survie animé par l’étrange Pielope.

Cela rappelle fortement Danganronpa et ce n’est pas sans raison : son créateur, Kazutaka Kodaka, s’est une nouvelle fois associé à Kotaro Uchikoshi pour créer un nouveau jeu étrange et plein de mystères. On avait déjà eu droit, il y a deux ans, à une première collaboration de bonne facture : Zanki Zero. On attend donc beaucoup de cette nouvelle collaboration. Malheureusement, si le jeu démarre sur les chapeaux de roues en plantant un univers bien connu, le soufflé retombe très vite. Le joueur se rend rapidement compte que quelque chose ne va pas et que ce jeu de survie n’est pas à la hauteur de Danganronpa. D’ailleurs, il ne constitue que le prologue du jeu. Le groupe de jeunes arrive à s’en sortir et remonte à la surface pour découvrir un monde post-apocalyptique : les gens ont disparu, les villes sont à l’abandon et des monstres terrifiants rôdent partout, ainsi qu’une armée de robot. Le Club des Battants, mené par Reycho qui n’a intégré le club que quelques mois auparavant, décide alors de rentrer à Tôkyô, où les enfants habitent, pour vérifier si la situation est la même là-bas. Commence alors un long périple de 1 200 km à travers le Japon, voyage pendant lequel l’amitié des membres du club sera mise à rude épreuve.

Visual Novel et plateforme

World’s End Club est avant tout un visual novel qui raconte une histoire assez étrange et affreuse, pleine de rebondissements, qui repose sur trois phases qui se répètent : une partie histoire qui permet de décrire ce qui se passe, un camp qui permet à Reycho de dialoguer avec les autres membres pour mieux comprendre leurs sentiments et leurs motivations et une phase de plateforme. Cette dernière phase constitue d’ailleurs l’un des points noirs du jeu.

Dans des niveaux au scrolling latéral, le joueur incarne un des jeunes et doit juste se promener en évitant des ennemis et en résolvant quelques puzzles très simples. Ces niveaux sont l’occasion d’utiliser les pouvoirs des personnages : chaque membre du club va éveiller un talent caché, fondé sur ses sentiments, qui sera utile pour avancer. On peut ainsi cracher du feu, devenir un super héros électrique, avoir une force surhumaine, être un champion de la batte, etc. Cependant, les niveaux sont très linéaires, ce qui rend l’exploration très limitée, même si le jeu incite à chercher des cartes à collectionner. Or, ces cartes se trouvent sur le chemin : il est donc difficile de les manquer ! De plus, les commandes, pourtant simplistes (un bouton pour sauter, un bouton pour interagir avec l’environnement et un bouton pour les pouvoirs) posent problème : le personnage ne réagit pas comme on voudrait, et pas toujours de la même façon. Ainsi, on peut bêtement manquer un saut ou avoir la surprise de constater qu’on est à portée des attaques alors qu’on ne devrait pas, ce qui occasionne des game over imprévus. Heureusement, le jeu sauvegarde automatiquement la partie et on recommence bien souvent là où on a perdu. Ces problèmes, qu’on n’avait pas rencontrés dans un jeu depuis longtemps, rendent les phases de plateforme pénibles et inintéressantes.

Un ton décalé et maladroit

Quand on a rencontré, à Japan Expo, le créateur Kazutaka KODAKA, qui s’occupe du scénario, il nous a affirmé beaucoup aimer alterner les scènes humoristiques et les scènes gores. On s’attend donc à retrouver la même chose dans World’s End Club et, si les premières minutes de jeu font référence à Saw, il n’en est rien. C’est une autre déception. On a même l’impression d’avoir un mauvais sous-produit de Danganronpa. En effet, on ne retrouve pas une bande de jeunes, pourtant stéréotypés, aussi déjantée que dans Danganronpa. Là, les enfants semblent mollassons et un peu niais. Même Pielope, qui fait office de successeur à Monokuma, ne lui arrive pas à la cheville : ce personnage ne possède ni son charisme, ni sa perversion, ni sa répartie et n’arrive pas à accrocher le lecteur. Pis encore, Pielope paraît complètement stupide, comme un gosse capricieux. Pourtant, il y a vraiment un gros travail d’écriture et l’histoire se suit agréablement, mais ce qui fait la force de Danganronpa est très vite dilué dans un univers plus classique et vraiment, mais vraiment, très coloré. Les musiques ne sont pas non plus exceptionnelles, alors que la bande-son fait la force d’un Danganronpa, par exemple.

Les dialogues essaient d’introduire une bonne dose d’humour et sont souvent décalés, mais cela tombe un peu à plat ou paraît téléphoné. Les voix anglaises sont correctes mais pas exceptionnelles, avec des voix de filles un peu nunuches par moments. Quand les doubleurs ne se trompent pas dans les noms ! Le jeu propose les voix japonaises originales, un doublage anglais et des textes en français avec quelques coquilles et grosses fautes, ce qui laisse vraiment penser que World’s End Club a bénéficié de moins d’attention que d’autres titres.

Une aventure à choix multiples

Ce que j’aime bien dans les jeu japonais, c’est qu’on apprend toujours plein de choses sur le Japon. World’s End Club ne déroge pas à cette règle et l’aventure met en avant les spécificités de chaque région ou ville traversée. Il y a aussi des références à de célèbres éditeurs qu’on vous laisse le soin de découvrir, surtout avec son ami Google pour vérifier.

La grosse force du titre, c’est de commencer par la fin. Dès qu’on lance le jeu, on aperçoit le groupe se faire exterminer par une créature étrange qui déclare que s’ils avaient fait d’autres choix, ils auraient eu une chance. Puis on revient en arrière, au tout début, et des choix s’offrent régulièrement aux joueurs. La bande de jeunes devant traverser tout le Japon, sans moyen de transport, il y a régulièrement des divergences d’opinion sur le chemin à emprunter. C’est à Reycho que revient de décider de la marche à suivre. Or, selon le choix, le groupe va se séparer momentanément et des événements différents vont subvenir. Cependant, rien n’indique si un choix sera meilleur qu’un autre. Le joueur est donc laissé totalement libre et ne saura que bien plus tard s’il a eu raison ou non. Il y a ainsi plusieurs fins possibles, qui peuvent survenir bien avant la fin réelle du jeu. Heureusement, le titre intègre un système permettant de choisir à partir de quel moment on veut reprendre l’aventure, afin de procéder différemment. C’est original et cela montre que le travail d’écriture a vraiment dû être énorme.

Un visual novel bien fait, mais un titre moyen

World’s End Club (ou Death March Club au Japon) possède des qualités scénaristiques indéniables : on est une fois de plus plongé dans un drame avec une énorme dose de science-fiction, une atmosphère très japonaise et des enfants qui ont parfois des conversations inattendues pour leur jeune âge, comme les allusions grivoises qu’on peut découvrir au camp. Il y a plein de rebondissements et des surprises, et le fait de devoir faire des choix à l’aveugle puis revenir en arrière en cas d’erreur implique plus le joueur dans les événements et casse la linéarité d’une histoire bien définie. Malheureusement, le gameplay approximatif et les phases de plateforme sans grand intérêt plombent un titre, qui, au point de vue de l’ambiance, n’arrive pas à la hauteur de ce qu’on attendait. Cette collaboration ne s’avère pas aussi fructueuse que prévue, même s’il y a de très bonnes choses à découvrir dans ce jeu. Les bonus de cette Deluxe Edition, à savoir un mini artbook et un extrait de la bande-son numérique, ne comblent pas les lacunes de World’End Club qui paraît un sous-produit de moindre qualité, au même titre que Danganronpa Ultra Despair Girls, comparé à la série principale.


World’s End Club est une nouvelle collaboration entre deux génies du visual novel, mais ne se hisse pas au niveau des œuvres respectives de chaque auteur, devenues cultes. La partie visual novel est très intéressante, avec un gros travail d’écriture pour permettre au joueur de faire plein de choix, mais les niveaux de plateforme, peu engageants, vont vite décourager les joueurs. C’est dommage, car l’histoire possède des qualités indéniables et mérite un meilleur traitement.

Enguy

Points forts :

– 12 personnages au style très manga
– Voix japonaises ou anglaises et sous-titres français
– Univers très coloré
– Très bonne histoire pleine de surprises et de références à la culture japonaise

Points faibles :

– Des phases de plateforme ennuyeuses
– Un gameplay approximatif
– Des personnages un peu mous et fades, trop caricaturaux
– On ne retrouve pas ce qui fait la force d’un Danganronpa ou d’un Zero Escape

 

LA NOTE : 13/20

 

Développeur / Éditeur : Too Kyo Games / Izanagi Games / NIS America
Genre : visual novel, plateforme
Supports : iOS, PS4, Switch
Date de sortie : 4 septembre 2020 (iOS), 28 mai 2021 (PS4, Switch)

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