Test : Everspace: Interstellar Edition (Switch)

Décembre 2018. Les joueurs sont affamés d’un nouveau *vrai* Starfox (Zero ne compte pas). Everspace pourra-t-il combler ce vide qui a envahi le cœur des fans ? Non, ce n’était pas son but, mais ça ne veut pas dire qu’il faut passer à côté… si l’idée d’un portage un peu poussif ne dérange pas.

Je ne connaissais Everspace que de nom avant son annonce sur Nintendo Switch et rien à propos de son développeur ROCKFISH Games. Le hit kickstarté n’est pas une aventure massive intergalactique comme je le pensais, mais un roguelike de grosse ampleur dans l’espace. Aucun problème, je suis ouverte et curieuse et sans a priori. Grand bien m’en a fait ! J’ai pu découvrir, vierge de toute connaissance, un univers étonnamment bien construit via des dialogues humoristiques, des combats intergalactiques un peu confus, mais enivrants… et de petits problèmes techniques malencontreux.

[Insérer référence obligatoire à Buzz l’Éclair]

Le protagoniste, à l’identité initialement inconnue, se réveille dans une capsule au milieu d’une station spatiale, avec pour seule envie de comprendre ce qu’il lui arrive. Ses cohabitants n’étant pas très coopérants, il se retrouvera plutôt à s’enfuir via un vaisseau récupéré illégalement dans le hangar. Alors que le jeu aurait pu s’arrêter là (un héros amnésique à la recherche de sa mémoire et d’un endroit sécurisé qui pourrait éventuellement trouver rédemption juste avant le générique), on a le droit à une très longue série d’échanges humoristiques entre le pilote et l’intelligence artificielle qui l’accompagne, différentes races extraterrestres aux divers conflits d’intérêt, ainsi qu’une véritable trame aux rebondissements variés. Une véritable bonne surprise dans un titre revendiquant ouvertement ses origines de roguelike et de shooter.

 

Apprêtez-vous à mourir. Beaucoup. Vous ne mourrez jamais autant de votre vie. Non pas parce que la difficulté est extrêmement élevée ou les contrôles alambiqués comme dans un Dark Souls ou Monster Hunter, mais parce qu’il vous faudra améliorer votre vaisseau le long de vos nombreux runs avant d’arriver au bout de la petite dizaines de secteurs disponibles. Ces nombreux décès sont d’ailleurs très bien pris en compte dans la narration, ne cassant ainsi jamais une immersion à laquelle on ne s’attendait pas, à un titre nous demandant basiquement d’aller de zone en zone pour y récolter des ressources en détruisant ceux s’y opposant – majoritairement des hors-la-loi ou des factions ennemies. Tout ce qui s’affiche en rouge, en fait. Quand on voit cette couleur, c’est qu’il faut tirer sur la gâchette. Simple et efficace, j’aime bien.
Le jeu se veut donc « à l’ancienne », court et à la rejouabilité facile. Les défaites sont fréquentes, le but étant plutôt de recommencer depuis le début ad nauseum en visant la zone d’un secteur plus éloigné, que de tout finir d’une traite. Minéraux, nano-robots, mais surtout crédits, tout est bon pour transformer votre vieille titine en un vaisseau d’exception ou de créer des objets en temps réel. Le grind initial est malheureusement sévère, voire décourageant, avec une forte sensation de n’avoir aucune idée de ce qu’il se passe et, surtout, de ce qu’on est censé faire. Après un tutoriel succinct et très bien implémenté, Everspace ne vous tiendra plus la main. Ce choix assez déroutant joue en fait en la faveur du titre, qui lui permet de garder les mystères de son univers et de l’Univers en général. On recommence donc l’aventure encore et encore, prêts à dévorer les moindres détails saupoudrés ici et là, excités à l’idée d’aller toujours vite, toujours plus loin… De surcroît, les environnements étant variés, on visite fréquemment des lieux inédits avec son personnage, missions et drama cassant ainsi en partie la répétition monotone inhérente au genre. Quand on vous dit qu’ils ont fait les choses bien !

 

Aller plus haut, aller plus haut !

Le principe d’un roguelike est en effet assez simple : le joueur est lancé dans un donjon généré plus ou moins aléatoirement, on s’y promène, s’y perd et généralement y meurt, avant de recommencer en gardant ce qu’on a pu récupérer lors de sa précédente visite. Or, en se plaçant dans l’espace, le titre de ROCKFISH perd la notion de labyrinthe et nous motive, au contraire, à visiter les lieux. Il se passe toujours quelque chose entre les différentes sessions de minage ou de décryptage d’antennes, mais votre activité principale restera de combattre des bandits ou de les éviter. Ces derniers ont en effet une fâcheuse tendance à vous presser le pas, à entraver la volonté de contemplation. Aucune zone n’est épargnée, on ne peut pas rester trop longtemps à un même endroit avant que notre position ne soit supposément révélée à nos assaillants. Une seule solution s’impose alors, la fuite vers l’endroit suivant qui sera elle aussi limitée dans l’espace (jeu de mots volontaire) et dans le temps.
Ainsi, la dimension spatiale -le labyrinthe impossible à répliquer dans un espace composé majoritairement de vide, rochers et quelques stations orbitales- a été remplacée par une dimension temporelle, et elle s’avère un peu plus frustrante que prévue. Les bords de l’écran sont submergés d’indications vous signalant la position des ressources ou ennemis, ce qui en pleine action a tendance à se multiplier dangereusement, devenant de fait difficile à suivre. Même avec un véritable copilote humain à vos côtés pour vous aider (DLC de relation humaine stable supportant votre passe-temps favori non inclus), les combats deviennent rapidement chaotiques, il est impossible de savoir d’où viennent les multiples tirs vous submergeant. Une option VR ou un son 3D serait bienvenu ! À défaut, on tourne sur soi-même à chercher les cibles, on en touche quelques-unes grâce à la généreuse aide à la visée, mais beaucoup de nos échecs viendront du bazar que sont ces joutes spatiales. Le nombre de cibles y est trop important pour qualifier le jeu de shooter comme il s’est lui même décrit ; avancer précautionneusement et éliminer ses assaillants un par un est une stratégie beaucoup plus viable… un peu comme un Splinter Cell de l’espace. On se croirait presque revenu au début des années 2000. Presque ?

 

Il y a longtemps, bien longtemps, apparemment trop longtemps…

Le jeu semble, en effet, tourner sur Xbox. Pas la One ni la 360, mais bien la première sortie au début du XXIe siècle. On est un peu sévère, on l’avoue, mais les problèmes techniques de ce portage Switch sont tels que le plaisir de jeu en est gâché régulièrement, que ce soit en mode portable ou sur télévision. On fait aisément l’impasse sur les textures floues et baveuses des structures métalliques humaines, un peu moins sur les différents rochers et astéroïdes ou ces ombres qui apparaissent subitement… mais quand les différents éléments du décor ne s’affichent tout simplement pas à temps, qu’on doit être assez près pour les voir, cela devient plus compliqué de se repérer. Les points importants restent visibles quel que soit votre endroit sur le carte, mais pas ce qu’il y a entre les deux. Malgré une palette de couleurs particulièrement bien choisie et des décors sublimes, Everspace arrive à gâcher le tout avec une image à l’aspect brouillon et au clipping omniprésent, sans compter les ralentissements.
Je n’en avais pas encore parlé ? On garde toujours le meilleur pour la fin ! Combien de combats ai-je perdu à cause d’une animation chutant fortement quand il ne le fallait pas ? Pour une fois que ce n’est ni à cause de la manette (je viens de changer mes Joy-Con) ni à mes capacités de joueuse (tout le monde sait que je suis la meilleure du monde), je suis rassurée. La limite que semble pouvoir tolérer le jeu est de deux ennemis simultanément. Au-delà, attendez-vous à avoir des informations semblant véritablement arriver en direct d’une autre galaxie. L’image saute, s’arrête, freeze et la surcharge d’informations rend la tâche d’autant plus difficile. On tourne sur soi-même pour espérer toucher ses cibles sans savoir où elles sont véritablement, et on le fait avec une petite poignées d’images par seconde. La joie règne en moi à chaque instant de ces gunfights, et jeter la « manette » contre le mur n’est pas une option en mode portable. Une Switch coûte cher.

Everspace est au final un excellent titre au plus bas de sa forme. Malgré des joutes aériennes un peu chaotiques et une limite arbitraire de temps, le soft de ROCKFISH Games a tous les atouts d’un grand. De vastes paysages à explorer, un scénario et univers simples mais accrocheurs, de l’humour et beaucoup de charme. Si ce n’était pour ces quelques difficultés techniques, la vitesse d’affichage en tête, ce serait une réussite quasi-totale. Ce n’est malheureusement pas le cas. Bien que je recommande cette épopée spatiale, sachez juste qu’elle ne se fera pas sans accro.

Marynou

Points forts :

– Un scénario intéressant
– Des dialogues amusants
– De magnifiques paysages
– Une bande-son inoubliable
– Une rejouabilité exemplaire
– Vraiment, je n’ai que des bonnes choses à dire, arrêtez de lire ça

Points faibles :

– Assez répétitif (comme tout roguelike)
– De gros soucis de fluidité aux pires moments possibles

La note : 15/20

Éditeur / développeur : ROCKFISH Games / ROCKFISH Games
Genre : Roguelike
Plateforme : Switch (testé), Windows, Xbox One, macOS, Linux, PlayStation 4
Date de sortie : 11 décembre 2018

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