Test : Uncharted 4 : A Thief’s End (PS4)

Uncharted_4-jaquette-coverQui aurait cru qu’en 2007, Uncharted : Drake’s Fortune, alors un énième Third Person Shooter, genre surreprésenté suite au succès surprise de Gears of War, poserait la première pierre de ce qui allait advenir la licence phare de Sony ?
Trois jeux sortis sur PS3, 2 épisodes sur Vita et des tentatives sur mobiles plus tard, voilà qu’arrive l’épisode conclusif de la série. Sera-t-il à la hauteur de l’excellence attendue d’un jeu Naughty Dog ?

Dude Raider

Cela a été dit et répété maintes fois, A Thief’s End constitue la toute dernière aventure de Nathan Drake, et par extension le dernier jeu de la série. Notre explorateur/profanateur de tombes favori, descendant improbable de l’Homme de Rio et d’Indiana Jones, devra ici découvrir le trésor du célèbre pirate Henry Avery, ayant réussi à constituer la plus grande fortune de l’histoire de la piraterie avant de disparaître mystérieusement. L’on retrouvera, dans cet épisode, un Nathan Drake marié à Elena Fisher, tiraillé entre sa soif de l’aventure et la promesse d’une vie rangée, dont le quotidien sera bouleversé par l’arrivée de son frère Sam, laissé pour mort il y a plus d’une décennie au Panama.
C’est l’équipe de développement en charge de The Last of Us, menée par Neil Druckmann et Bruce Straley, qui dirige cet ultime épisode de la série, suite au départ d’Amy Hennig et Justin Richmond au cours du développement du jeu, en 2014. Ce nouveau cap se ressent dans de nombreux aspects tout au long du jeu, mais le plus évident reste le ton, bien plus viscéral, « grounded », sombre et réaliste, apporté par le duo créatif ayant réussi à construire un univers et des personnages aussi crédibles, touchants et sonnant juste que dans TLOU. Ce ne sont plus les moments les plus spectaculaires, dignes d’un blockbuster de l’été, qui marquent le joueur dans cet aventure, mais les moments plus intimistes et ancrés dans la réalité et la vie quotidienne. Uncharted a toujours été une série se voulant réaliste, mais l’écriture des personnages atteint ici de nouveaux horizons, les rendant plus consistants et crédibles que jamais. L’on n’a plus vraiment le sentiment d’être accompagné par des IA, mais par de vrais personnages aux motivations et aux émotions plausibles et auxquels on se sent plus que jamais proches. Même les méchants se voient dotés d’un traitement équivalent, et sont aussi bien écrits et attachants que l’on puisse espérer d’un jeu de cette trempe.

Le rythme de l’aventure est assez inhabituel pour la série. Bien plus posé, il permet davantage le développement des personnages, les dialogues sont bien plus mis en avant, l’on peut assister à de nombreuses conversations optionnelles au cours de nos phases d’exploration, tout comme dans TLOU. Si Uncharted 2 était un rollercoaster dont le rythme ne retombait jamais vraiment, enchaînant les séquences de bravoure et d’explosions susceptibles de faire décrocher la mâchoire à tout instant, c’est étrangement avec ce rythme plus calme et presque intimiste par moments que l’on profite au mieux des scènes d’action, pouvant alors davantage briller que si elles étaient noyées sous un flot incessant de surenchère.

En outre, c’est l’épisode de la série où l’on est amené à le plus explorer les environnements, ce qui est la moindre des choses pour un jeu dont le héros est censé explorer les lieux inexplorés à la recherche de reliques et autres trésors. La puissance accrue de la PS4, par rapport à son aînée, permet non seulement un bon visuel et technique hallucinants, des modélisations de personnages laissant bouche bée et un nombre faramineux d’éléments affichés à l’écran, mais surtout, la taille des zones de jeu s’en trouve considérablement agrandie. L’on se sent ainsi bien plus libre, parfois même perdu, dans des environnements bien moins cloisonnés, où les panoramas à couper le souffle s’enchaînent sans interruption et où les trésors, lettres d’explorateurs défunts et points d’intérêts à noter dans son journal (des apports issus de The Last of Us, comme les fameuses caisses et échelles à transporter) sont disséminés un peu partout.
De manière globale, il y a même moins de gunfights et de rencontres avec les ennemis tout au long du jeu. L’on a ainsi beaucoup moins l’impression d’enchaîner les arènes où les ennemis arrivent par vagues incessantes, faisant fi de toute forme de logique narrative, et cette parcimonie dans le dosage de l’action est un plus indéniable au profit de l’expérience globale.

Les développeurs s’amusent via un trophée de la fameuse « dissonance ludo-narrative » (la différence entre : ce que le jeu raconte et ce que l’on joue), notamment le fait que Nathan refuse de presser la gâchette dans une cinématique, mais massacre des centaines de gardes tout au long du jeu. Cet ajustement de l’action permet de réduire cet écueil bien plus présent dans les précédents volets, et l’impression que Nathan est un surhomme capable de gravir n’importe quelle montagne est atténuée par les très très nombreuses scènes contextuelles où tout se dérobe devant nous et les séquences où Nathan est visiblement vulnérable physiquement et incapable de continuer, vu ce qui vient de lui tomber sous le nez.

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 Dr No no no no no !

La formule Uncharted n’a pas été révolutionnée avec ce 5e volet (en incluant Golden Abyss sorti sur Vita), mais bien des aspects ont été affinés afin de rendre l’expérience toujours plus plaisante et fluide.
La progression alterne 3 piliers que sont les combats à l’arme à feu ou au corps à corps, les scènes d’exploration des environnements et d’escalade aux murs, corniches et parois diverses, et des énigmes assez sporadiques disséminées tout au long du jeu.
Si l’on pouvait trouver les gunfights assez mous dans les modes de difficulté les plus bas des précédents volets, de très nombreux ajustements ont été apportés à cet opus, afin d’effacer les critiques précédemment formulées par certains joueurs. Le recul des armes se fait bien plus ressentir, d’autant plus que chaque tir occasionne une légère vibration de la manette, renforçant l’implication dans l’action, le réticule de visée informe désormais lorsqu’un tir a touché la tête d’un adversaire ou quand ce dernier a succombé à nos assauts, évitant ainsi de gâcher des balles dans le vide, comme ce put être le cas précédemment. L’IA a été améliorée, sans pour autant transcender des sommets de stratégie et de tactique, elle ose bien plus qu’auparavant contourner nos positions, détruire nos abris éphémères à l’aide de grenades, ou appeler des renforts. Cela se ressent d’autant plus dans les modes de difficulté supérieurs où les ennemis sont encore plus vifs et détectent le joueur encore plus facilement dans un rayon bien plus large, rendant plus complexe toute approche furtive.

À plusieurs reprises dans le jeu, il est désormais possible d’opter pour une approche infiltration afin de progresser, ce qui n’était quasiment jamais le cas dans les précédents volets.
Comme dans TLOU, nos coéquipiers sont indétectables, évitant de pester sur l’IA un peu bête ayant grillé notre progression, au détriment de l’immersion. Cette décision de game design est à saluer, car l’on évite alors le travers classique de tous les jeux vidéo ayant des séquences d’infiltration en coop ou d’escorte, où souvent c’est l’IA qui nous fait perdre ou nous handicape.

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En sus de l’infiltration, les nouveautés majeures de ce 4e épisode canonique sont l’introduction d’une corde, d’un piolet et d’une Jeep. Cela paraît anodin dit comme ça, mais la mécanique introduite par le grappin et son système de balancier permet de rendre bien plus variées les phases de grimpette sur des rebords toujours plus friables à même les falaises et les bâtiments en ruine. L’on peut, en outre de réaliser des sauts toujours plus vertigineux, s’en servir comme un moyen de tracter de nombreux éléments du décor pour progresser. Le piolet, qui apparaît bien plus tard dans l’aventure, permet, comme dans le reboot de Tomb Raider, d’augmenter la portée du personnage pour accéder à de nouvelles prises et continuer son ascension sur des roches voisines (pun intended).
La voiture, enfin, présente seulement dans quelques chapitres, permet d’explorer les niveaux les plus vastes du jeu de manière bien plus confortable et rapide, et même d’activer certains mécanismes à l’aide de son treuil rétractable.
Bien évidemment, qui dit Naughty Dog, dit baffe graphique.

Comme vous l’aurez très certainement constaté par vous-même dans de nombreuses vidéos ou screenshots, Uncharted 4 est assurément l’un des jeux les plus incroyables techniquement qui tourne actuellement sur consoles ou PC. Cela ne se résume pas bêtement à la résolution (1080p) ou au framerate (30 frames par seconde, mais sans aucune chute, même lors des passages les plus chargés, et 60fps en multijoueur), mais à la richesse visuelle dont fait preuve le jeu à chaque instant.
Les modélisations faciales et les animations ont atteint un niveau jamais vu sur aucune autre production vidéo-ludique, réussissant à répliquer les gestes et mimiques humaines à un tel niveau qu’à aucun moment le syndrome de la ‘uncanny valley’ ne se fait ressentir.
Que ce soient les modèles 3D, les cheveux, les yeux (l’un des récurrents problèmes de la génération précédente, où beaucoup de personnages avaient des yeux de poissons morts), les aspérités de la peau, les rides, le grain des tissus qui composent les vêtements, la surface des roches, la représentation de l’eau et de la pluie, les effets de lumière… absolument tout est remarquable à tout point de vue.

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Le souci du détail de Naughty Dog force le respect, et en découvrant des détails par dizaines, l’on ne peut qu’être admiratif du fait accompli. Aucun autre développeur n’aurait pris le temps de se pencher sur des détails aussi insignifiants que les cheveux du héros réagissant dynamiquement lorsque mouillés par l’eau, la poussière sur le toit d’une voiture qui s’efface sous nos pas, le fait qu’un personnage féminin puisse transpirer dans le dos au cours d’une cinématique, que les nez de deux personnages qui s’embrassent se tordent lorsqu’ils s’entrechoquent, la boue qui reste sur les vêtements et les armes suite à une glissade, le fait que désormais, l’on voit Nathan dessiner lui-même les croquis présents dans le carnet, l’occlusion ambiante causée par la réaction de la pupille et de l’iris à la lumière lorsque l’on sort d’un endroit sombre, les éclairages dynamiques, le rendu de l’eau, de la poussière, de la mousse, des particules, la diversité et la variété de la faune et de la flore, le fait qu’aucune pierre ni aucun élément du décor ne ressemble à un autre…

Tous ces éléments, lorsque regroupés ensemble, ne font que contribuer à tendre vers le réalisme absolu qui est l’objectif ultime des développeurs, chaque lieu visité a une histoire, contribuant à plonger le joueur dans une immersion toujours plus grande et pouvoir profiter de l’histoire ici racontée.
L’influence des développeurs de The Last of Us se ressent enfin dans énormément de décors de la seconde moitié du jeu, où la nature et la végétation reprennent leurs droits, offrant des panoramas toujours plus bluffants et dépaysants, que ce soit dans des jungles, des bâtiments, des grottes, des falaises ou des tombeaux anciens.

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La fin d’un filou

Uncharted 4 est le plus beau vitrail technologique que la PS4 aurait pu espérer, mais c’est très loin d’être son seul atout. Il s’agit non seulement du plus beau jeu de la console, mais il constitue, en outre, une excellente suite, dont le changement apporté par la nouvelle équipe créative aux commandes depuis le départ d’Amy Hennig ammène la nouveauté dont avait besoin la série. Il fait également office de conclusion parfaite à la saga, avec une fin extrêmement juste, poignante et mémorable.
La dernière aventure de Nathan Drake est sans nul doute la meilleure.

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Uncharted 4 est, sur tous les aspects, un miroir de The Last of Us, lui empruntant beaucoup, que ce soit dans sa construction, sur des mécaniques nouvelles introduites à la série, certains décors, mais aussi son ton plus sérieux et prenant aux tripes. Il parvient à la même excellence que cet illustre modèle conçu par les mêmes géniteurs en apportant des idées et des approches nouvelles et bienvenues.
Espérons, dès lors, qu’il n’y aura pas d’autre jeu s’appelant Uncharted à l’avenir, comme promis par les développeurs, leur permettant de s’atteler à la création de nouveaux univers et de laisser ces personnages qu’ils ont fait grandir 10 ans durant sur cette conclusion parfaite. Sauf si c’est un spin-off avec Sully, auquel cas c’est un oui franc et massif.

Falcon

Points forts :

– Le jeu le plus impressionnant qui soit sur consoles
– Un souci du détail jamais vu jusqu’alors dans un jeu vidéo
– Le brio du jeu des acteurs
– L’écriture remarquable
– Une fluidité de tous les instants
– La meilleure conclusion qui soit pour cette saga
– Les apports innombrables de l’équipe de The Last of Us
– Contenus bonus copieux (modèles, artworks, modificateurs de gameplay, filtres)

Points faibles :

– L’infiltration assez limitée
– Certains poncifs et clichés inhérents au genre
– Moins de séquences « money-shot » qu’auparavant
– Multijoueur pas très complet au lancement

LA NOTE : 18/20

 

Éditeur : Sony Interactive Entertainment
Développeur : Naughty Dog
Genre : Third Person Shooter / Aventure / Action
Support : PS4
Date de sortie : 10 mai 2016

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