Test : Vectronom (Switch) redonne des couleurs à Rez
On ne sait pas vraiment quoi vous dire, à part qu’il s’agit d’un classique. Ce n’est même pas la peine de cliquer, sauf si c’est sur le bouton « achat » sur Steam ou Switch.
J’ai beau avoir connu les dinosaures, ce n’est qu’avec la Dreamcast que j’ai véritablement rencontré les jeux musicaux. À vrai dire, mon premier jeu obtenu *très légalement* fut Space Channel 5 Part 2 dont la version occidentale semblait avoir disparu à tout jamais. Autant dire qu’entre le génie de Tetsuya Mizuguchi, la folie Samba de Amigo (maracas achetés avec mon premier salaire) et les Dance Dance Revolution (avec tapis), j’étais servie. Parappa the Rapper et ses suites, aussi mémorables furent-elles, ne m’ont jamais vraiment marqués, ne serait-ce qu’à cause de leur timing toujours un peu maladroit… Sans compter qu’ils étaient sortis sur une console toute pourrie. Vectronom me rappelle en tous points cette époque d’or de la dernière console de SEGA, un concept simple à l’esthétique particulière qui happe, à peine le soft démarré.
La musique dans la peau
Bien que notre héros soit un cube en plus d’être notre compagnon, il n’a pourtant aucun rapport avec Portal. Ils ont néanmoins tous les deux l’objectif de distribuer l’amour, le jeu de Valve avec un cœur et celui de Ludopium avec des couleurs arc-en-ciel étonnamment pertinentes en ce mois de juin. Notre ami devra traverser des labyrinthes psychédéliques en suivant scrupuleusement le rythme d’une musique en constante évolution. Libre à vous de ne pas suivre le tempo, sachez juste que le jeu vous juge méchamment à chaque niveau terminé via un pourcentage assez précis.
Vectronom est simple. On ne peut que faire rebondir ce quadrilatère se dandinant au sens du rythme dans quatre directions, ce qui est pourtant bien plus compliqué qu’il n’y parait. La note, soit le scoring, n’est pas la seule raison de se forcer à tenir le rythme, les mondes sont directement construits autour de ce principe. Après quelques parcours assez simples où on se dit que suivre le tempo est inutile, on comprend notre erreur en s’arrêtant un instant pour analyser ce qu’on a devant nous. Loin d’être fixe, le chemin est en changement perpétuel et on finira rapidement dans le vide ou empalé si on ne fait pas attention. Certains ponts n’apparaissent qu’à des mesures précises et une analyse rigoureuse du parcours est obligatoire avant de lancer. Une fois le principe compris, tout s’enchaîne étonnamment rapidement, au point qu’un speedrun les yeux fermés est tout à fait envisageable pour le commun des mortels.
Un classique de la musique pas classique
La comparaison avec le monolithe Rez s’impose d’elle-même. Le mélange de puzzle-game et jeu musical ressemble beaucoup dans sa progression au soft de SEGA. Plus que d’être relativement simple, il nous met dans une sorte de transe spécifique à Mizuguchi (SEGA Rally, Space Channel 5, Rez, Lumines, Tetris Effect) où le monde extérieur s’efface pour laisser place à celui des sens. L’association de formes abstraites multicolores à un rythme s’accélérant à chaque changement de pièce captive d’une manière très spécifique, clairement inspirée du maître en la matière. Bien loin de l’action d’un Gitaroo Man ou d’un Ouendan, Vectronom demande de souffler un grand coup avant de s’élancer dans son aventure psychédélique.
N’allez pourtant pas croire qu’il est dénué de sa propre personnalité. Il s’agit là d’un nouveau type de jeu musical, une espèce de Q*bert relaxant à la rejouabilité infinie. Se procurer ce jeu est comme acheter un album de plus à sa collection, un qu’on écoutera – jouera – de temps en temps pour le simple plaisir de revivre l’aventure. Aucun plot twist, de découvertes de dernière minute, juste de bonnes idées qui s’enchaînent les unes après les autres qu’on ne peut que vouloir réécouter une fois terminé. Sentir les basses s’exciter et les instruments s’ajouter au fur et à mesure d’un même parcours est quelque chose que je n’avais pas vu depuis une vingtaine d’années. Un classique.
Un deuxième joueur peut également s’emparer de ce Joy-Con en trop pour une fête endiablée de puzzles musicaux. Le jeu ressemble alors plus à un party game qu’à l’expérience relaxante initiale, offrant ainsi une autre vision du soft de Ludopium. S’il y a des choses à regretter, elles sont rares et minimes : quelques rares problèmes de perspectives dus à une absence de repères spatiaux sur les niveaux les plus abstraits et un éditeur de niveaux qui nous permettrait de créer et partager nos propres hits avec les internets. Des broutilles pour un soft d’exception à se procurer immédiatement, un petit studio au niveau des plus grandes têtes pensantes.
Marynou
Points forts :
– Coloré et esthétique
– Original
– Bande-son exceptionnelle
– La sensation d’avoir un classique dès les premières secondes de jeu
Points faibles :
– Très rarement brouillon
– Toutes les bonnes choses ont une fin. Pas sûre que ce soit un défaut, ceci dit.
LA NOTE : 19/20
LA NOTE : 19/20
Développeur / Éditeur : Ludopium / Arte France
Genre : Puzzle-game musical psychédélique X party game
Support : Switch (testé), Steam
Date de sortie : 29 mai 2019