Test : Kingdom Come: Deliverance 2 (Xbox Series X)
Après un premier épisode très remarqué, Warhorse revient avec une suite des aventures de Henry de Skalice. L’occasion de voir si le studio tchèque parvient à transformer l’essai.
Sorti en 2018, le premier Kingdom Come tapait très fort et s’imposait déjà comme la licence incontournable du C-RPG. Optant pour le parti pris du réalisme absolu, le jeu se montrait aussi immersif qu’aride avec son gameplay jusqu’au-boutiste. Un gameplay dont certains aspects ont largement été revus et d’autres conservés, le studio se montrant à l’écoute des retours mais intransigeant sur sa vision globale.
Previously in Kingdom Come Deliverance
À la classique question « dois-je avoir fait le premier avant de lancer le second ? » il est nécessaire de répondre que nous sommes bien en présence d’une suite directe et que, sans être une obligation, avoir joué à Kingdom Come premier du nom est un vrai plus dans l’expérience globale. Les flashbacks ou diverses conversations destinés à l’exposition ne suffisent pas à résumer les précédentes aventures de Henry et la présence de nombreuses références en mode « clin d’œil » risquent de frustrer le nouveau venu. Pour tout vous dire, j’ai fini l’épisode précédent il y a deux ou trois ans et malgré les flashbacks, je me suis imposé des vidéos de lore sur Youtube afin de me rafraichir la mémoire. Cette dernière solution est probablement la meilleure si vous attaquez la franchise par ce second épisode.
L’autre grande question concerne la méthode utilisée par le studio pour créer une suite crédible pour « remettre les compteurs à zéro » alors que le personnage principal avait fini son voyage précédent avec des capacités de chevalier émérite. Warhorse utilise un joli twist du scénario et une pirouette un peu grossière pour y parvenir. Henry se retrouvant totalement dépouillé dans les dix premières minutes (de façon très crédible et assez maline), puis « perd » ses connaissances lors d’une chute brutale (moins malin, mais efficace).
Henry repart, littéralement, nu et va devoir reconquérir son honneur, son équipement, toujours à la poursuite de l’homme ayant volé l’épée de son père.
Dura Lex, Sed Lex
Le studio tchèque a toujours mis l’emphase sur l’aspect réaliste de son titre, ne faisant que peu de compromis niveau confort de jeu. Deux choses avaient découragé les joueurs dans l’épisode précédent : le système de sauvegarde et les mécaniques de combat.
Le combat a largement été revu pour proposer une expérience agréable. Exit le principe de la direction de la lame quand il faut bloquer un coup, il suffit maintenant de respecter le timing du marqueur apparaissant à l’écran. La direction de la frappe est quant à elle conservée, mais plus simple. Un maitre d’arme rencontré dans les premières heures permettra même de rendre les combats contre plusieurs adversaires plus faciles. Certains se plaindront peut-être d’avoir perdu l’aspect simulation totale, mais la grande majorité des joueurs en sortira gagnante.
La sauvegarde est encore conditionnée au repos dans un lit ou à la consommation d’une potion du sauveur mais, sauf erreur de ma part, les checkpoints sont un peu plus nombreux. Il est également toujours possible de forcer la sauvegarde en quittant le jeu.
Les autres mécaniques n’ont pas particulièrement changé, nos capacités continuent de s’améliorer au fil de l’aventure en fonction de nos actions (façon Elder Scrolls) et il sera possible de dépenser des points d’expérience afin d’apprendre des compétences. L’apparence et la propreté de Henry sont toujours des éléments d’une importance capitale (même lors des phases de furtivité si, si). Globalement, assez peu de changement mais un lissage de tout ce qui fonctionnait bien, même les déplacements sont plus agréables.
Fantaisie Héroïque
Exactement comme dans le jeu précédent, l’absence de magie et de dragons n’empêche en rien de connaitre une aventure épique. On retrouve le même genre de quêtes, du travail d’intérêt général à l’enquête pour le pouvoir local. L’avantage de la recherche de réalisme à tout crin est de pouvoir proposer des fetch quests qui ne dénotent pas dans l’ambiance générale. Chasser des loups a nettement plus de pertinence dans la Moravie du XVe siècle que n’importe quel RPG/MMO d’heroic fantasy de ces 30 dernières années (surtout lorsqu’il s’agit de sauver un péquin en état d’ivresse perché dans un arbre). La majorité des missions (surtout annexes) permettront de récupérer capacités et équipements perdus, mais également d’apprendre à créer des potions (dont certaines vraiment utiles). Il est important de noter que toute la partie alchimie bénéficie du même traitement que le reste. Ici, nul maintient de la touche X pour crafter une potion, il faudra mélanger les bons ingrédients en respectant les quantités, l’ordre, la température, etc. C’est un vrai travail d’artisanat pouvant laisser sur le côté une partie des joueurs, mais ajoutant une dimension immersive énorme. Il est facile de se perdre dans les campagnes ou les villages de Kingdom Come: Deliverance 2, oubliant totalement la quête principale tant la promenade est une aventure en elle-même. Passer un quart d’heure à aiguiser son épée après avoir occis quelques malandrins, compléter son herbier en explorant champs et sous-bois, tout est prétexte à l’évasion sur les terres de Bohême.
Toutes les médailles ont des revers
Malgré toutes les qualités du titre, certains défauts peuvent largement refroidir les ardeurs les plus intenses. Expédions d’abord l’histoire des doublages français qui a pas mal fait jaser. Oui, certaines répliques de PNJ semblent jouées par des personnes qui ne savent pas ce qu’elles font là et le ton général est plutôt nanardesque, mais c’est en cours de correction d’après le studio.
Le plus gros souci, de mon point de vue, vient des animations datées, surtout dans les phases de dialogues. Si vous trouviez que Starfield paraissait statique, vous allez pester régulièrement durant votre aventure. Sans que cela ne nuise vraiment à l’expérience générale, cette « faiblesse technique » casse un peu l’immersion, d’autant que le jeu est visuellement somptueux. Sans demander une réalisation à la Cyberpunk 2077, un peu plus de mise en scène aurait probablement transformé le titre en chef-d’œuvre absolu.
L’interface, très jolie, s’avère également très peu pratique et assez lourde. Vu le temps que l’on passe dedans, il est dommage que le studio n’ait pas réussi à proposer une formule un peu plus digeste.
La dernière doléance concerne le système de sauvegarde qui se contredit lui-même. Si le principe d’une sauvegarde limitée au craft de potions, au repos dans un lit ou à certains points de sauvegarde automatique est plutôt cohérent avec la rugosité du gameplay général, pourquoi laisser le loisir de sauver en quittant vers le menu ? La plupart des joueurs (moi le premier) va abuser de cette technique pour s’épargner les contraintes du lit ou de la potion, annulant de fait leur intérêt. l’ajout d’une option facultative de sauvegarde à la volée aurait pu éviter cette contorsion.
La vie de Bohême
Vous l’aurez compris, même si Kingdom Come: Deliverance 2 est loin d’être parfait, c’est déjà sans le moindre doute l’un des meilleurs RPG de ces dernières années. Suffisamment unique dans sa proposition pour séduire les amateurs du genre. Warhorse a su magnifier une licence déjà prometteuse et a prouvé qu’il était à l’écoute des joueurs afin d’améliorer l’expérience dans la majorité des domaines. Il est d’ailleurs très important de préciser que le jeu bénéficie d’une excellente finition pour un titre de cette envergure, extrêmement loin des errances de son prédécesseur perclus de bugs à la sortie. Les thèmes abordés sont plus variés, plus modernes et donnent l’impression, pardon pour le terme galvaudé, d’une vraie maturité du studio.
Sur ce, je ne peux évidemment que vous recommander de vous lancer dans l’aventure qui est d’ailleurs loin d’être terminée pour moi ; après une petite vingtaine d’heures, je ne pense pas encore avoir vu la moitié de ce que le jeu a à m’offrir.
« Audentes Fortuna Iuvat »
Ominae
Points forts :
- Le parti pris réaliste sans concessions (ou presque)
- L’écriture des quêtes et des personnages
- Rarement la campagne aura été aussi belle
- Le système de combat adapté
- Le souffle de l’aventure
Points faibles :
- La mise en scène datée des dialogues.
- La lourdeur de l’interface
- Le système de sauvegardes bancal
- La version originale (tchèque) disponible uniquement sur PC
La note : 18/20
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La note : 18/20
Développeur : Warhorse Studios
Éditeur : Dep Silver
Genre : C-RPG médiéval
Support : PC, Xbox Series, PlayStation 5
Date de sortie : 4 février 2025