Test : Fire Emblem : Three Houses (Switch)
Meilleur démarrage de la série, ventes le plaçant parmi les grands de la Switch… À quoi est dû le succès de Fire Emblem: Three Houses, mais surtout, le vaut-il ? On n’a pas forcément les réponses, mais ça vous donne envie de cliquer quand même.
Je pense qu’Intelligent Systems ne s’attendait définitivement pas à ce que sa série de jeux de stratégie/RPG née en 1990 sur NES perdure plusieurs décennies. Alors qu’elle essayait tant bien que mal de se faire une place en occident après la popularité soudaine de Marth dans Super Smash Bros Melee, ce n’est vraiment qu’avec Fire Emblem: Awakening de 2012 qu’elle perça définitivement. Cet opus, conçu comme le chant du cygne de la saga, surprit la société en détruisant littéralement les ventes. Une vache se devait d’être traite : arrivent des suites ambitieuses, un spin-off musclé et même un jeu mobile extrêmement rentable. Les 30 années désormais quasiment atteintes, la série joue la carte de la maturité avec Fire Emblem: Three Houses, un mastodonte commercial tenant avec trois simples bouts de ficelle charismatiques.
The winds of Fódlan
Dans l’optique de redonner un coup de jeune à sa série, Intelligent System a passé la main aux studios Koei Tecmo pour cet épisode, un choix logique après leur partenariat réussi sur Fire Emblem Warriors. La société créatrice a néanmoins gardé un œil sur le développement du jeu en envoyant quelques-unes de leurs têtes pensantes. Le résultat est un Fire Emblem qui se débarrasse de beaucoup d’idées du passé pour en introduire de nouvelles bien à elles.
L’histoire, assez classique, reprend le principe de Fates, sans le vendre en kit cette fois-ci. En tant que professeur au monastère de Garreg Mach, vous aurez à enseigner l’art de massacrer son prochain à une bande de jeunes facilement impressionnables issus d’un des trois territoires du pays de Fódlan. On choisit initialement sa petite équipe préférée au feeling, entre la waifu, Eldegard proposant une trame tragique, le pittoresque Claude plus simple et le classique Dimitri.
C’est dans une ambiance que ne saurait renier Harry Potter, de la proviseure qui envoie des mômes au casse-pipe pour son intérêt personnel (Rhea), à l’adjoint cachant ses véritables intentions derrière un visage de marbre (Seteth). Un environnement qui marche et qu’on aurait adoré visiter sur plusieurs années consécutives à la manière de l’épique série de J.K. Rowling. Une progression en ligne droite ne prend, hélas, qu’une grosse trentaine d’heures, ce qui n’arrive probablement à personne, vu le plaisir que procure de jouer au professeur-un-peu-sorcier.
Le jeu étonne par les thèmes adultes qu’il aborde. Non content de barbouiller ses scènes d’hémoglobine, FE3H discute d’avortement, de dépression et de maltraitances infantiles avec une aisance inhabituelle pour un jeu Nintendo. On s’accroche pour une fois à un personnage, non pas pour son apparence (à l’exception d’Eldegard, soyons sérieux), mais pour leur histoire souvent profonde, tragique, mais surtout à laquelle on peut se référer.
Les retournements de situation ne sont pas nombreux, mais surprennent, tout du moins si vous êtes bon public et assez simplette comme moi. Des péripéties à vivre en japonais comme en anglais, chacun choisira son camp ; d’un côté ceux qui n’ont pas de goût et de l’autre ceux qui en ont… mais on ne juge pas !
Good morning professor!
Il est inutile de tourner autour du pot-au-feu : le titre est techniquement si faible qu’on pourrait croire à une blague. La faute revient à Koei Tecmo qui semble avoir réutilisé comme il pouvait le moteur graphique de Warriors sans trop se concentrer sur le ressenti manette en main et pas la faible puissance relative de la Switch.
Un développeur avait déclaré dans un reportage assez récent qu’on pouvait ressentir le soucis du détail dans la manière dont les personnages tournent en courant. Nintendo ou les jeux Platinum respirent et vivent par cette philosophie, la manière dont réagit et est animé Mario est ce qui le rend si amusant à le contrôler. En comparaison, se promener dans le monastère de FE3H est une expérience bien fade. Le protagoniste démarre et s’arrête immédiatement et tourne sans que l’élan soit pris en compte. Ses pieds ne touchent pas le sol, les ralentissements sont constants et les différents éléments du décor apparaissent au fur et à mesure. Pire, les environnements sont si carrés et peu détaillés qu’on se croirait revenu en fin de génération PlayStation 2.
Heureusement que la direction artistique très réussie des personnages assez rigides rattrape le tout ! Le style cel-shading va parfaitement au soft et permet de souligner le charisme des différents étudiants qu’on passe son temps à côtoyer. Très bien écrits, il faut comme d’habitude enchaîner les interactions avec eux pour développer leur niveau de relation et potentiellement leur passer l’anneau au doigt. Cette mécanique introduite dans Awakening est, hélas, ici bien simplifiée ; pas d’enfant du futur qui vient vous rendre visite, pas de bonus ou de contre-attaque spécifique si vous vous battez côte à côte, sauf exceptions. Un moins qui, bien que n’arrivant pas seul, n’enlève rien au plaisir de jeu en lui-même.
You took everything that I love!
Le cœur du gameplay se trouve bien évidemment sur les champs de bataille où les combats se déroulent au tour par tour. Bien plus facile que les opus précédents, Fire Emblem: Three Houses est le point de départ parfait pour les nouveaux arrivants. Quant aux anciens, ils n’hésiteront pas à monter la difficulté aussi haut que possible pour profiter des enjeux terribles si chers à la série.
Malgré ses faiblesses techniques, jamais le terrain n’a été aussi dynamique. Chaque unité peut être accompagnée d’un bataillon aux utilités différentes, apparaissant directement en jeu pour une véritable sensation de guerre sauvage lors des affrontements. Les animations des héros évitant les coups avant de riposter sont absolument phénoménales, l’inverse des Playmobils du monastère.
À vrai dire, la personnalisation de ses combattants est plus poussée que jamais. Les plus réticents, mal à l’aise ou juste maladroits, peuvent automatiser, voire ignorer toutes les possibilités offertes par Koei Tecmo, mais ce serait passer à côté d’un des plus gros points forts du titre. L’aspect RPG n’a jamais été aussi loin au grand dam des réfractaires de menus !
Heureusement pour ces derniers, la musique accompagnant ces choix littéraires incessants est absolument phénoménale. Nous avons là l’une des meilleures bandes-sons de tout Fire Emblem. Bien que restant dans le style habituel de ces derniers opus, on ressent une certaine maturité souhaitant accompagner les thèmes adultes que peut aborder cet épisode. Se procurer l’édition collector a finalement un gros plus, vu que ça évite d’essayer de retrouver l’OST quelque part sur internet. De la drogue à l’état pur.
Vous l’aurez compris, Fire Emblem: Three Houses mérite amplement sa popularité. Ses performances techniques indubitablement faibles pour la machine sont rattrapées par le plus important pour atteindre le cœur des joueurs : une âme. Des personnages complexes et charismatiques, des mécaniques de jeu captivantes et une bande-son en béton armé, FE3H a tout pour plaire et faire partie des indispensables de la Switch.
Marynou
Points forts :
– Une histoire classique, mais très bien ficelée
– Un cast attachant
– Une OST de folie qui vaut l’achat du collector à elle seule
– Les combats, toujours aussi prenants
– Une difficulté modulable pour plaire à chacun
– Très grande rejouabilité
– Personnalisation très poussée
Points faibles :
– Pas très joli
– Garreg Mach assez ennuyeux à visiter, personnages raides
– Ralentissements incessants
LA NOTE : 17/20
LA NOTE : 17/20
Développeur / Éditeur : Koei Tecmo / Nintendo
Genre : Jeu de Stratégie, Dating Sim, Game of Thrones-like, Waifu Simulator
Support : Switch
Date de sortie : 28 juin 2019
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