Test : Devil May Cry 5 (Xbox One) s’amuse avec les chiffres romains

On ne sait pas si les démons ont enfin versé leur larmichette, mais les joueurs peuvent s’apprêter à pleurer de joie.
Dans un monde parallèle, une caméra a été secrètement placée dans la salle de meeting de Capcom pour mettre les échanges en bonus sur le Blu-Ray. Comme ça ne suffirait pas pour comprendre comment on en est arrivés là, feu Satoru Iwata de Nintendo nous ravirait d’une de ses fameuses interviews. Dans notre dimension, hélas, on ne peut que supputer sur ce qui a pu se passer. D’où sortent toutes les affabulations insensées de ce nouveau Devil May Cry ?

Face à un blockbuster en développement depuis si longtemps, nous n’avons qu’une seule réponse : cette folie est volontaire et travaillée dans ses moindres recoins pour un résultat prêt à redonner le sourire aux plus moroses d’entre nous.

Nero Burning Rom

Pas d’enjeux sans catastrophe : des démons ont de nouveau envahi notre monde pour, cette fois, y planter un arbre géant. Le héros de longue date, Dante, s’y retrouve piégé comme un débutant et y vit un enfer avec ses camarades de prison. C’est à nouveau au tour de Nero de sauver la situation en compagnie de son nouvel acolyte V, le grand mystère de cet épisode au nom faisant subtilement allusion au chiffre romain qu’aurait pu adorner ce cinquième épisode. Probablement afin de satisfaire un quota ou attirer la gente masculine, la mécanicienne Nico à la loquacité impertinente vient compléter ce Scooby Gang on ne peut plus charismatique. Bon point : sa présence immanquable n’a rien à voir avec la quantité de peau qu’elle peut montrer ou son bonnet du début de l’alphabet. On a bien les petits angles de caméra tendancieux habituels, mais face au nouveau venu à moitié nu, ça ne fait pas le poids. Nico est la meilleure, que ça se sache.

Le jeu enchaîne les mises en scène loufoques dont on ne peut que se délecter. Semblant tout droit sortir d’un Bollywood, les séquences d’action capillotractées où l’on traverse des camions en plein vol avant de courir sur les murs s’enchaînent sans aucun moment de répit. Nico et son tas de ferrailles bravent ciel et murs, prêts à tout démolir sur leur passage au moindre coup de téléphone donné en pleine mission. La version Deluxe du titre va encore plus loin en proposant des versions alternatives hilarantes des vidéos à très bas budget, du jamais vu dans un AAA. Il est vrai que l’écriture des dialogues est un peu bancale, mais l’enchaînement textes poétiques, répliques chocs et tirades à la Kingdom Hearts sans broncher a définitivement un charme irrésistible. En arborant ainsi une ambiance nanar à l’enrobage digne d’un soft vendu plein tarif, Devil May Cry 5 capte le joueur et le motive à s’intéresser à son histoire relativement basique. De quoi calmer les ardeurs des fans du bouton Start.

À jamais Dante ton cœur

La force de cet univers est telle qu’on en oublierait presque qu’on peut jouer entre deux vidéos. Une chose est sûre, cet épisode cherche à se démarquer de ses prédécesseurs, ainsi que du fantôme de son créateur Hideki Kamiya qui a quitté le navire Capcom depuis bien longtemps. C’est simple, on a jamais été autant aux antipodes de titres d’action de type Bayonetta. L’arme de Nero, lourde, lente et maladroite nous force à se frotter physiquement aux ennemis, pendant que la magie démoniaque de V nous place quasiment en simple spectateur de l’action. Un troisième chevalier servant rejoindra la partie pour faire le pont entre les deux, offrant ainsi un gameplay relativement varié plus que bienvenu. Le jeu nous proposant parfois de choisir le personnage que l’on veut incarner, on peut dire qu’il y en a pour tous les goûts ou presque : je n’aurais pas dit non à un quatrième tournant à l’œstrogène, mais on ne peut pas tout avoir.

De par leurs contrôles, aucun des trois protagonistes ne se rapproche de l’action très rapide à laquelle la série nous avait habitué. Le titre reste relativement lent et surtout assez direct dans ses contrôles. Deux boutons d’attaque, un de distance et un de corps à corps, malléables en fonction de la position du stick et du système de visée, ainsi qu’un autre de saut servant aussi d’esquive. Les combos sont relativement simples, souvent loufoques, nous faisant encore plus apprécier la variété du casting. Au final, ce sont plutôt les capacités propres aux différents héros qui retiennent notre attention, à commencer par le bras mécanique de Nero. Le pauvre n’a pas eu de chance, il a perdu son bras ; heureusement que dame Nico est là pour l’aider à se gratter l’entrejambe en lui en construisant un autre. Le zigoto a peut-être perdu une partie de ses pouvoirs d’outre-tombe, mais le nouveau système de grappin permet de dynamiser efficacement les différentes joutes ; c’est bien simple, on passe notre temps à s’accrocher à tout pour se déplacer aussi vite que possible et ça marche.

Ce nouvel appendice se décline également sous de multiples modèles, d’un crochet lambda à l’arme de Mega Man, chacun avec des spécificités qui leur sont propres. Rien n’est hélas gratuit dans ce monde, ces choses-là sont plus ou moins à usage unique. En effet, en cas de situation critique, une autre touche vous permet de faire exploser votre trésor instantanément, vous sortant ainsi in extremis d’une mort certaine en expulsant vos adversaires loin de vous. Pratique ! N’oubliez néanmoins pas que « pas de bras, pas de chocolat » ; qui voudrait vivre dans un monde pareil ?

V.. roum !

Ce n’est, au final, qu’au niveau de la présentation que le bât blesse. La patte graphique réminiscente de l’ère 360/PS3 n’aide malheureusement pas le jeu à garder une animation fluide et stable sur Xbox One première génération. Les soubresauts sont fréquents, nous sortant assez aisément de l’action aux pires moments possibles. En ce qui me concerne, je suis vieille, grabataire et même MILF, j’ai vécu à une époque où jouer à un FPS comme Perfect Dark à environ 15 fps était le futur, où Ocarina of Time ne dépassait pas la vingtaine d’images par seconde… Nombre de joueurs ont pu se plaindre de cet aspect de Devil May Cry, mais ça n’a pas été véritablement mon cas. Il est dans tous les cas relativement frustrant de ne pas pouvoir bénéficier d’une animation sans failles, parce qu’on a pas craqué pour le dernier modèle de machine en date…

On apprécie également les niveaux, ouverts et tortueux sans en devenir labyrinthiques, ponctués par une bande-son metal qui déchire les tympans si on a le malheur de jouer au casque. Cette dernière est particulièrement réussie, méritant l’achat d’une version vinyl un de ces quatre, si j’en avais le lecteur. Le thème original a bien été changé comme prévu après les bavures pédophiles du chanteur et on peut définitivement avancer que le changement ne blesse pas le titre comme on aurait pu l’imaginer… On en oublierait presque les vidéos racistes et transphobes du doubleur de Nero et les remarques sexistes pro Trump de celui de Dante.
Nous vivons définitivement dans une drôle d’époque où un réseau universel nous reliant tous permet de connaître instantanément toutes les crasses se cachant derrière nos œuvres préférées. Il s’agit encore d’un cas où on se doit de séparer le produit des artistes si on veut en profiter pleinement, mais c’est pourtant bien là le seul vrai bémol du jeu, pour moi. Il est désormais rare de pouvoir se réfugier dans le dernier film, livre ou jeu en date sans avoir en tête des polémiques prenant place dans notre monde. Devil May Cry 5 est malgré lui un exemple parfait de cette problématique tout à fait moderne, où on sait ouvertement qu’on apprécie un produit créé par des personnes qu’on ne supporterait que difficilement. Une broutille pour certains, un mal-être pour d’autres. Ça ne m’empêche pas de faire des SSS en combat, ceci dit, regardez bien :

Le dernier né de la saga Devil May Cry de Capcom est une grande réussite… À la surprise de tous ? Plus lourd à manier que ses aînés pour une expérience de jeu entièrement nouvelle, le titre surprend par son ambiance décalée et sa bande-son de qualité. De surcroît, j’y suis la meilleure tueuse de démons, et ça c’est quelque chose que j’aime bien !

Marynou

Points forts :

– Ambiance originale et captivante
– Gameplay varié
– Musique metal bien grasse
– Forte rejouabilité

Points faibles :

– Décors un peu laids
– Ralentissements

La note : 17/20

Éditeur / développeur : Capcom / Capcom
Genre : Action, Beat’em all
Plateforme : Steam, PlayStation 4, Xbox One
Date de sortie : 8 mars 2019

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