Test : Steins:Gate 0 (PS Vita)

steinsgate-0-coverNe vous êtes jamais vous demandé ce que cela ferait de pouvoir prévenir votre moi du passé afin de vous éviter bien des situations incongrues ? Et si vous pouviez retrouver vos proches disparus grâce à la numérisation de leurs souvenirs ?
Ce sont à toutes ces questions métaphysiques qu’Okabe Rintaro et sa bande d’amis seront confrontés au cours de leurs aventures. Serez-vous prêt à les rejoindre ?

To rule time is to rule the world

Okabé Rintaro (dit Okarin) est un otaku tout ce qu’il y a de plus normal, habitant dans le célèbre quartier Tokyoïte d’Akihabara, à ceci près qu’il s’amuse à créer, accompagné de ses meilleurs amis, des inventions susceptibles de changer la face du monde depuis un modeste local loué une misère à un réparateur de télévisions.
C’est un jour, en bidouillant son micro-onde, qu’il fabrique par inadvertance une machine à voyager dans le temps, ou plus précisément, qu’il parvient à envoyer des SMS dans le passé par le biais d’interférences causées par ledit micro-onde. Ces messages vont logiquement lui permettre de modifier le passé (et par suite logique le présent dans lequel il se trouve) en faisant converger le monde vers une réalité alternative différente, suite à l’avertissement envoyé par SMS. Vous suivez toujours ?
Évidemment, cela est bien pratique pour s’envoyer les réponses d’un examen que l’on a raté ou pour éviter des situations gênantes et corriger ses erreurs passées, mais cette invention attirera très vite beaucoup d’envieux qui chercheront également à modifier la réalité et le monde dans lequel on se trouve.
Le SERN (l‘équivalent fictif de la réelle Organisation Européenne pour la Recherche Nucléaire, le CERN) est vite mise au courant des expérimentations temporelles de la bande du Scientifique Fou autoproclamé, et tentera très vite de le mettre au silence lui et sa bande, désireuse de garder le monopole du voyage dans le temps.
Par chance, seules certaines personnes possèdent la capacité de conserver leurs souvenirs lors des différents voyages dans le temps/entre les mondes, et notre héros en fait partie, ce qui lui permettra de contrer le destin qui paraissait pourtant tout tracé.
Voici grosso modo le pitch du premier épisode, dénué de tout divulgâchage (spoil) majeur.

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Avertissement de taille : contrairement à ce que son titre laisse supposer Steins;Gate 0 n’est pas un préquel indépendant se situant avant les évènements du premier Steins ;Gate sorti l’an passé en France. Sans entrer dans les détails, disons que cet épisode se situe dans une réalité qui est celle de la « mauvaise fin », chose suffisamment rare pour être soulignée. Hormis Retour vers le Futur 2 et le monde du Trunks du Futur dans Dragon Ball, peu d’œuvres de fiction ont en effet pris le parti de présenter un monde où le héros a failli à sa mission initiale, voire a abandonné tout espoir. Contrairement à ce que l’on pourrait croire, il ne s’agit pas d’une vulgaire suite située dans un univers alternatif, mais c’est bien plus que cela : c’est le complément idéal du premier volet.
En ce sens, il est impératif d’avoir joué à Steins;Gate premier du nom pour apprécier cet épisode à sa juste valeur, sans quoi d’une part vous ne comprendrez rien à l’histoire et aux concepts scientifiques développés dans cette « suite », d’autre part vous ne bénéficierez nullement de l’attachement émotionnel envers les personnages qui est primordial pour que cette suite puisse fonctionner et avoir un impact sur le joueur.

Si cette brève présentation de l’univers vous a inspiré, je ne saurais que trop vous recommander d’essayer Steins;Gate disponible sur PS3 et PS Vita qui se trouve désormais à petit prix, que ce soit en version physique ou sur le PlayStation Store, ou même de regarder l’adaptation animée en 24 épisodes licenciée en France (mais qui ne couvre que l’histoire directement jusqu’à la vraie fin, sans passer par les fins alternatives).

Zéro introduit évidemment son lot de nouveautés, permettant de justifier cette suite développée plus de 5 ans après le premier jeu. En premier lieu, de très nombreux changements liés à l’interface et à l’ergonomie ont été apportés, rendant la progression encore plus fluide et agréable, et cela se traduit notamment par le remplacement du vieux téléphone à clapet d’Okarin par un smartphone tout tactile. De nombreux personnages viennent compléter le casting en marge de ceux déjà établis : Daru (le meilleur ami du héros), Mayuri (l’innocente assistante d’Okarin), ou encore Faris Nyan Nyan (la maid survoltée aux oreilles de chat). Feront, entre autres, leur apparition : la scientifique surdouée et précoce Maho Hiyajo, ainsi qu’une Intelligence Artificielle dotée des souvenirs, émotions et façon de penser d’un proche défunt d’Okarin, avec lequel il tentera de se rapprocher pour combler le manque affectif et essayer d’effacer la marque de son deuil.

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Lugia-in Kyouma

Steins;Gate 0, en plus d’avoir un nom compliqué et peu clair, fait partie d’un genre qui est de base naturellement clivant.
Il s’agit d’un visual novel, un genre peu populaire et développé en Occident, mais très populaire au Japon. Pour ceux qui ne sauraient pas de quoi il s’agit, c’est l’équivalent de ce que serait un roman adapté en jeu vidéo.
La différence majeure avec le roman est la présence de doublages, d’images pour illustrer l’action et de musique en accompagnement, mais dans le fond, tout l’intérêt repose sur la lecture. Un bon visual novel, tout comme un bon roman, est celui où l’auteur aura su ,grâce à sa qualité d’écriture, rendre ses personnages intéressants et crédibles et son monde suffisamment captivant pour happer le joueur/lecteur.
Dans les faits, le gameplay se traduit essentiellement par le fait de presser une touche ou d’appuyer sur l’écran tactile pour passer à la ligne de dialogue suivante. Décrit de la sorte, il est normal que cela puisse rebuter le premier joueur venu. En effet, si on joue à un jeu vidéo, c’est justement pour jouer. Certains diront que si on veut suivre une belle histoire, des millions de romans font bien le travail, et que sans la part d’interactivité, on perd ce qui fait la spécificité du médium (de très nombreux essais ont été écrits sur la question). Heureusement, il existe plusieurs genres de VN. Certains sont extrêmement linéaires et on se contente simplement de lire, sans aucune autre forme d’interaction du joueur, et le même déroulement est identique pour tous : cela s’appelle un kinetic novel.
L’autre genre majeur du visual novel, ce sont les VN à embranchements narratifs, et SG0 en fait partie.
L’élément majeur de différenciation réside dans la présence de choix, d’embranchements et de multiples fins.
Présenté comme ceci, ce genre de VN est davantage proche d’un « livre dont vous êtes le héros » que d’un roman où tout le monde aura le même déroulement et le même dénouement.
Bien sûr, il y a bien souvent une vraie fin écrite par les scénaristes sur laquelle tout le monde est censé retomber après avoir découvert toutes les fins possibles, mais cela permet à chaque joueur de vivre une aventure légèrement différente de celle des autres.

J’ai moi-même longtemps été réfractaire des VN, ne comprenant pas l’intérêt que les gens pouvaient y porter, alors que je pouvais simplement lire un livre sans avoir besoin d’artifices visuels et sonores pour me plonger dans une bonne histoire.
Pour un fervent défense de « l’école du gameplay » comme moi, l’intérêt majeur du jeu vidéo réside dans le fait de surmonter un challenge, gagner un duel face à la machine, me surpasser, ou tout simplement prendre du plaisir en me plongeant dans un monde différent l’espace d’une partie.
C’est l’équilibre entre le challenge proposé et la récompense qui définit le plaisir qu’on prend à jouer. J’avais donc du mal, sur le papier, à comprendre l’intérêt d’un genre où on retire absolument toute la part d’interactivité et de challenge, le « jeu vidéo » perdant sa dimension de « jeu ».

Mais ça, c’était avant. Avant de jouer à des jeux comme Phoenix Wright, la série des Zero Escape, ou même le premier Steins ;Gate, qui ont totalement fait voler en éclat mes a priori.
Avec son histoire captivante reposant sur le concept, pourtant maintes fois traité, du voyage dans le temps, sa maîtrise de concepts scientifiques crédibles, ses nombreux moments de bravoure, Steins ;Gate a su me marquer durablement, comme trop rarement des jeux vidéo narratifs ont su le faire par le passé.
Comme très souvent dans les VN à embranchements, le scénario et le game design de SG0 viennent justifier le fait que le héros puisse voyager entre les dimensions et effectuer tous les choix possibles afin de trouver la bonne réalité, tout en ayant conscience des réalités passées. Cela a souvent un intérêt lorsqu’il faut résoudre un puzzle, ou lorsqu’il faut être au courant d’un certain évènement pour progresser, or cette information n’est pas encore accessible dans la réalité où l’on se trouve.
Contrairement au premier épisode qui demandait de choisir entre différents choix de réponse possibles à des SMS, cet épisode demandera au joueur d’accepter ou d’ignorer des appels provenant de telle ou telle personne en présence de personnages spécifiques. Cette simplification apparente rend la progression bien plus fluide et moins frustrante dans la quête de la vraie fin, avec en outre, une représentation visuelle des choix déjà effectués.

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Le Psy Kangourou

Il est difficile de parler de SG0 sans trop en dire et ainsi risquer de gâcher l’intérêt majeur de cette saga, à savoir la découverte de cet univers incroyable aux personnages poignants, à l’univers dingue et aux retournements de situation frénétiques.
Si vous avez lu cette critique jusqu’au bout, vous vous situez à l’intersection de deux réalités possibles.

  • Vous n’avez pas joué à Steins;Gate, mais la présentation de cet univers vous a plu et vous aimez les histoires de voyage dans le temps : vous devez jouer à Steins ; Gate !
  • Vous avez déjà fini ou vu Steins ; Gate et vous faites partie des élus éclairés par la lumière de la vérité : aucun doute possible, vous devez jouer à Steins ; Gate 0 !

Comme il s’agira essentiellement de lire du texte, je ne saurais que trop vous recommander la version Vita qui est la plus adéquate pour profiter du titre, car transportable, au même titre que n’importe quel roman de poche.

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Steins ;Gate 0 est la suite que vous avez toujours voulu sans même le savoir. En dépit de ce que l’on aurait pu croire, le premier volet ne répondait pas totalement à toutes les questions en apportant, clé en main, la fin heureuse. Cette « suite » réussit un double exploit. Grâce aux thématiques nouvelles et aux nouveaux personnages introduits, Zéro parvient à se distinguer suffisamment pour ne pas être considéré comme un simple décalque, mais comme une aventure à part entière ; et dans le même temps il constitue la 2e moitié d’une même histoire, devenant indissociable de l’œuvre globale une fois découvert. El Psy Kongroo !

Falcon

Points forts :

– Des personnages incroyablement attachants
– Un récit haletant
– Une histoire de voyage dans le temps rondement menée
– Doublages d’excellente facture

Points faibles :

– Il faut aimer lire
– Entièrement en anglais
– Une aventure moins marquante que le premier épisode
– Le style graphique déroutant qui ne convaincra pas tout le monde

La Note : 16/20

Développeur : 5pb, Nitroplus
Éditeur : PQube
Genre : Visual novel
Supports : PS Vita et PS4
Date de sortie : 25 novembre 2016

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