Test : RONIN (PC)

RONIN-1Maintenant qu’on est entre nous, je peux vous le dire, RONIN n’est pas passé loin du limogeage en règle. La semaine dernière, j’étais prêt à lui coller un bon gros 8/20 à grands renforts de « jeu mal branlé », et puis, pouf, le titre de Tomasz Waclawek s’est soudainement révélé, délivrant enfin les sensations promises par le concept : infiltration classieuse et combats au tour-par-tours confinant à un ballet mortel. Pour une poignée de minutes et sans compenser les nombreux défauts qui affligent le titre, malheureusement.

Die Katana

On passera rapidement sur l’histoire (simple revenge-plot à la Kill Bill) pour se concentrer sur le gameplay, ses petites subtilités et ses gros défauts. N’en déplaise à son créateur, les mécaniques de base de RONIN sont précisément celles de Gunpoint, le jeu d’infiltration de Tom Francis : on dirige son avatar avec les touches du clavier et on détermine où l’on va sauter via un arc de cercle à l’amplitude modifiable. Toutefois, contrairement à son inspiration première, RONIN s’apparente aussi à un jeu d’action où il faut impérativement éliminer tous les gardes d’un niveau pour réussir, dans un système de tour-par-tour pas très intuitif à prendre en main.

Tant que vous progressez dans l’ombre, hors de vue des ennemis et des quelques civils encore présents dans ces bâtiments louches et ultra-protégés, le jeu se déroule en temps réel et, selon les capacités que vous aurez débloqué en jouant, vous pouvez éliminer quelques menaces discrètement avant de vous lancer dans la mêlée. Dès l’instant où les gardes vous ont repérée (parce que vous venez d’éventrer l’un de leurs collègues sous leurs yeux), le jeu se déroule au tour-par-tour et l’on ne repassera au temps réel qu’après avoir éliminé chaque adversaire.

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Pendant cette phase au temps suspendu, il est impossible de se déplacer au sol : chaque tour équivaut à une seconde et on ne peut que faire des sauts pour atteindre les ennemis qui, eux, restent statiques. Tuer un garde coûte un tour, pendant lequel vous êtes vulnérable à toute attaque : le jeu vous indique les lignes de tirs des ennemis à chaque tour et il faut donc décider s’il vaut mieux mettre KO un autre garde ou finir celui qu’on vient de mettre à terre (ce dernier restera inactif quelques tours).

Le bestiaire, justement, parlons-en. Peu varié, il est composé de seulement trois types d’ennemis : les gardes de base qui tirent à chaque tour et rechargent au bout de 4 ou 5, les samurais qui peuvent dasher dans n’importe quelle direction et qu’on ne peut pas mettre KO en leur rentrant dedans (il faut les attaquer deux fois pour les tuer) et les « mitrailleurs » qui tirent au même endroit deux tours d’affilée. Deux autres adversaires existent même si ces derniers sont incapables d’attaquer : ils se contentent de donner l’alarme, dix secondes après vous avoir repéré.

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Not Gunpoint

Votre meilleure chance de venir à bout de n’importe quelle salle est la barre de combos située en bas de l’écran : à chaque action « utile » – soit mettre KO en rentrant dans un garde, soit tuer un ennemi – la barre, à cinq crans, se remplit. Un point pour un KO, deux pour une élimination et quand vous atteignez les cinq points, vous gagnez un tour pendant lequel les ennemis n’agiront pas. Attention, à chaque tour passé sans accomplir un KO ou une élimination, la barre perd un point : il est donc crucial d’enchaîner ces actions pour éliminer toutes les menaces le plus rapidement possible.

De plus, au fur et à mesure de votre avancée, des capacités spéciales viennent se placer sur cette barre : téléportation et KO sur une cible, lancé de katana, aveuglement de tous les ennemis… Le jeu propose 5 ou 6 capacités qui se débloquent une fois un certain niveau de combo atteint : si vous choisissez d’utiliser une capacité, la barre de combos se vide entièrement. Le problème étant que pour obtenir ces capacités, il faut récolter des points de skills en réussissant un niveau à la perfection : chaque niveau possède un objectif principal (pirater des infos/tuer une cible) et deux secondaires (épargner les civils et ne pas déclencher d’alarme), trois défis qu’il faut remplir pour gagner un précieux point de skill.

Ce qui revient à dire que si vous dosez déjà le jeu, vous obtenez des pouvoirs vous facilitant grandement la vie lors des missions suivantes mais que si vous n’arrivez pas à « bien jouer », vous êtes condamné à galérer jusqu’à la fin du titre : une progression de la difficulté en dépit du bon sens, alors qu’il aurait suffit de donner un point de skill après chaque boss, indépendamment de la réussite des  objectifs secondaires. J’ai tout même fini par débloquer tous les pouvoirs disponibles, mais cela s’est fait dans le sang et les larmes, tant le jeu peut s’avérer injuste et ce, de manière totalement arbitraire. Car en plus d’être difficile, RONIN se paie le luxe inutile d’être imprécis.

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Jump arc is f*%!ing lie !

Voilà le gros point noir du titre : que vous maîtrisiez le gameplay ou non, il y aura toujours une part d’aléatoire passablement absurde qui peut rendre un affrontement proche de l’impossible. Que ce soit le comportement des ennemis (qui dépend de l’angle de votre saut) ou le fait que que l’indice de saut soit mensonger, vous allez échouer régulièrement sans que vous ne puissiez rien y faire. Ainsi, il est extrêmement frustrant de prévoir un saut qui doit bousculer un ennemi et vous placer en sécurité, mais qui, lors de la résolution du tour, s’avère être un saut de puce qui vous place en plein dans la ligne de mire de tous les ennemis présents. Et le jeu semble assumer ce manque de précision : un des indices qui apparaît aléatoirement est justement « Jump arc is a lie« , confirmant par là le célèbre adage que l’on réserve habituellement aux jeux mal foutus (et aux développeurs peu scrupuleux), « It’s not a bug, it’s a feature« .

J’ai déjà abordé l’absurdité de demander au joueur de maîtriser le jeu pour lui donner de nouveaux pouvoirs avec lesquels il pourra avancer plus sereinement (et donc en débloquer d’autres) mais j’y reviens pour vous donner quelques conseils : commencez par débloquer le pouvoir permettant de pendre les ennemis au plafond – ce qui permet de faire le ménage dans des salles un peu trop peuplées – ainsi que celui qui permet de se téléporter sur un adversaire et le mettre KO, de loin les capacités les plus utiles du titre. Le leurre n’est pas franchement intéressant à jouer et le lancé de katana vous désarme pendant plusieurs tours, ce qui peut vite être contre-productif dans la mesure où le jeu récompense justement l’enchaînement d’éliminations.

D’autres défauts viennent noircir le tableau, à commencer par les environnements peu variés, bien que la direction artistique façon Batman – The Animated Series soit une vraie réussite. Le titre est également très court : même en galérant sur les trois quarts des missions, j’ai bouclé le jeu en cinq petites heures, avant d’y retourner pour débloquer tous les pouvoirs. Et le scénario est tellement inexistant qu’on peut passer totalement à côté, si on ne se rend pas compte qu’il y a un court texte au début de la deuxième mission de chaque chapitre : la teneur de l’histoire étant tellement rebattue qu’on peut s’en passer allègrement, notez.

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RONIN est une véritable déception. Plombé par de nombreux défauts rédhibitoires pour certains, il est fort probable que la plupart des joueurs lâche l’affaire passés les trois premiers niveaux (il n’y a qu’à aller voir les statistiques des Succès Steam pour s’en convaincre), frustrés par une difficulté herculéenne et une imprécision rageante. Cependant, une fois le jeu maîtrisé, il s’avère fun et prenant, ne serait-ce que pour les quelques minutes nécessaires pour refaire tous les niveaux parfaitement. Je ne vous parle même pas du New Game + totalement pété qui m’a fait balancer ma manette dès le premier boss. Premier carton jaune pour Devolver, dommage.

Go-Ichi

Points forts :

  • Un gameplay profond et complexe (une fois le jeu maîtrisé)
  • Un sentiment de puissance jouissif (une fois le jeu maîtrisé)
  • Une direction artistique élégante

Points faibles :

  • Des choix de game-design en dépit du bon sens
  • Difficulté herculéenne (même une fois le jeu maîtrisé)
  • Gameplay peu précis (même une fois le jeu maîtrisé)
  • Très court (une fois le jeu maîtrisé)
  • Scénario inexistant et inintéressant

 

La Note Gamingway : 12/20

Développeur : Tomasz Waclawek
Editeur : Devolver Digital
Genre : Puzzle-game/Infiltration
Supports : Windows (version Mac et Linux à venir)
Date de sortie : 30 Juin 2015

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