Test : Etrian Odyssey 2 Untold – The Fafnir Knight (3DS)
Vous permettez que j’appelle ce jeu « Etrian Untold 2 » pour toute la durée de l’article ? Parce que 1) les titres à rallonge, c’est rigolo deux minutes, mais c’est une plaie à taper au clavier, et 2) on n’est pas payé au signe chez Gamingway !
L’Odyssée Etrianne Non-Dite 2 – Le Chevalier Fafnir
Si la série des Etrian Odyssey n’est pas aussi populaire dans l’Hexagone que celle des Persona (pourtant du même développeur), elle reste une saga majeure dans l’histoire des consoles portables de Nintendo : 3 épisodes sont sortis sur la DS originale et un quatrième sur 3DS en 2013, dans le but de dépoussiérer le genre un peu désuet du dungeon-crawler grâce à son utilisation intelligente de l’écran tactile. En effet, la particularité de la série d’Atlus est de demander au joueur de tracer lui-même la carte des différents donjons, au fur et à mesure de l’exploration de ces dédales forestiers. On dessine consciencieusement chaque détour, en prenant soin d’indiquer la position de coffres, portes et escaliers pour se repérer facilement lors des pérégrinations suivantes.
Pas de génération aléatoire toutefois, chaque niveau a été pensé et designé avec amour par des développeurs soucieux de nous mettre la pâtée à chaque tournant de ces niveaux tortueux. Récemment, en plus de deux spin-offs plutôt réussis (Persona Q et Etrian Mystery Dungeon), Atlus a décidé de remettre au goût du jour sa saga principale en remakant les premiers épisodes : un nouveau titre bien trop long plus tard et vous obtenez les Untold, remakes des deux premiers Etrian Odyssey, qui refondent graphismes et B.O. tout en ajoutant de nouvelles mécaniques de jeu. Le premier Untold est sorti en 2014 et ce début 2016 voit l’arrivée du second épisode dans notre riante contrée (en anglais uniquement, toutefois).
Le mode Histoire constitue un ajout essentiel de cette mouture Untold, car les Etrian Odyssey époque DS ne s’embarrassaient guère d’un scénario : on créait son équipe de cinq aventuriers et un prétexte fumeux nous envoyait cartographier une immense canopée labyrinthique près de l’Arbre Yggdrasil. Avec cet Untold 2, on suit les aventures d’un groupe hétéroclite composé de Flavio, un archer un peu froussard ; Arianna, une princesse/mage de soutien qui doit accomplir un rituel ancien ; Bertrand, un protecteur cynique, mais avec un bon fond ; Chloé, une mage de guerre souffrant d’Asperger et d’une fascination malsaine pour la nourriture ; et enfin, de notre avatar, le Chevalier Fafnir du titre, héros lambda aussi fade qu’un navet.
Vous l’aurez compris, cette histoire n’est guère plus inspirée qu’auparavant et recycle des clichés propres au shônen qui ne me touchent pas particulièrement. Comme on dit : les amateurs amateureront, les haïsseurs haïsseront. Cela dit, elle fonctionne également comme un balisage discret de la progression des nouveaux joueurs (tout en étant plaisante à suivre) : une manière intelligente d’indiquer la bonne direction sans prendre complètement par la main. Les premiers Etrian ne proposaient tout juste qu’un tutoriel au début de la partie et vous lâchaient en plein labyrinthe sans autre conseil que « fais gaffe, c’est dangereux ». On ne comprenait que trop tard qu’il s’agissait en fait d’un avertissement déguisé destiné à nous recommander une prudence de tous les instants, les combats pouvant se solder par un game over instantané suite à une mauvaise décision.
Car oui, Etrian Untold 2, malgré des petits ajouts sympathiques venant adoucir l’expérience de jeu (la possibilité de recommencer un combat qui nous a été fatal ou de garder les informations de notre carte même après un game over), reste un titre difficile. Les combats au tour-par-tour peuvent paraître injustes de prime abord (jusqu’à ce qu’on trouve la faiblesse du monstre), la présence de créatures balèzes dès le premier niveau peut faire un peu peur (votre équipe n’en fera qu’une bouchée une fois plusieurs étages passés) et les évènements optionnels qui parsèment le labyrinthe semblent un peu trop souvent en votre défaveur (jusqu’à ce que… chut, spoilers !).
Bref, on reste dans du dungeon-crawler velu où il faut progresser trèèès prudemment et attribuer des points de compétences à chacun de vos personnages de manière à se créer une équipe équilibrée : le mode Histoire vous donne une quintette de classes interdépendantes et complémentaires, ce qui est parfait pour débuter. On alterne donc entre phase d’exploration dans le labyrinthe et repos/emplettes/prise de quêtes en ville.
Que les joueurs aguerris se rassurent, un mode classique est disponible dès le début, pour celles et ceux qui ne souhaitent pas s’encombrer de l’enrobage scénaristique. Ce mode permet ainsi de se débarrasser des personnages imposés et de choisir soi-même les différentes classes de ses aventuriers. On retrouve avec plaisir ce mélange de fantasy typiquement japonaise et de mythologie nordique (l’Yggdrasil est un élément central des contes et légendes scandinaves et Fafnir, une créature monstrueuse présente dans le cycle de Sigurd) qui fait toute l’identité et la saveur de la série Etrian.
Donjon, baston, marmiton
Concernant la partie « donjon », on se trouve en plein dungeon-crawler japonais au tour-par-tour, où chaque déplacement (dans des étages découpés en cases) a une importance quasi-capitale : plus vous vous déplacez et plus une jauge colorée passe progressivement du bleu au rouge, vous indiquant l’imminence d’un combat (avec des variations en fonction du moment de la journée et de la zone concernée). Ces derniers se résolvent également au tour-par-tour : on choisit toutes les actions de nos personnages en même temps (en prenant soin de créer des synergies entre les compétences de chacun) et la caractéristique « Vitesse » décide l’ordre de résolution.
En se débrouillant bien, on peut donc empêcher un monstre d’attaquer, voire de l’éliminer en un seul tour en exploitant ses faiblesses (ce qui rapporte des bonus en ingrédients et matériaux, voir « Cinq conseils aux débutants »). Et que serait un Etrian Odyssey sans ses combats de boss dantesques et tendus comme des str… fils à couper le beurre ? Untold 2 honore une fois de plus son contrat avec des affrontements difficiles et recelant parfois quelques twists au cours du combat, à même de faire suer les joueurs les plus expérimentés (le Flame Demon, une bien belle saloperie).
Remplir la carte n’est pas qu’un gimmick rigolo, car une fois correctement complétée (le jeu tolère des approximations), vous débloquerez le « Floor Jump », une sorte de voyage rapide qui vous permet de passer rapidement d’un étage à l’autre sans avoir à le retraverser. Utile quand on atteint les étages 10+ de la fin de partie et pour s’éviter des combats inutiles contre des monstres trop faibles. Des raccourcis vous permettent aussi de couper des passages entiers des niveaux, mettant en lumière tout le talent des level-designers pour créer des étages tortueux mais dont l’entrée et la sortie se trouvent généralement l’une à côté de l’autre.
Côté « ville », on retrouve les classiques « Auberge » pour se soigner, « Bar » pour prendre des quêtes et « Marchand » pour l’équipement, mais très vite, un restaurant se débloque avec de nouvelles mécaniques venant rompre la routine Donjon/Auberge/Marchand : la chef Regina vous demande de décoder des recettes pour trouver quels sont les ingrédients nécessaires à leur réalisation, puis de récupérer lesdits ingrédients lors de vos combats contre des monstres. Les plats consommés ont chacun un bonus associé, bien utile lors de vos ascensions du labyrinthe, sans qu’il soit possible de cumuler ces effets : un seul et c’est marre.
De plus, une partie « Développement de la ville » vous permettra de mettre un peu de pâte de haricots dans vos doriyaki : investir de l’argent dans la rénovation d’un quartier de la ville permet d’attirer de nouveaux clients au restaurant, clients qu’ils faut séduire en faisant de la pub pour un plat susceptible de leur plaire. Si votre campagne a du succès, vous gagnez un petit pactole pas dégueulasse. C’est tout simple et très malin, tout en apportant une respiration bienvenue après une expédition compliquée.
Visuellement, le jeu est magnifique : les décors fixes de la ville fourmillent de détails, une prouesse compte tenu de la résolution réduite des écrans des 3DS, et les niveaux en 3D ont bénéficié d’une refonte salutaire. On n’échappe malheureusement pas à une certaine monotonie propre au genre : chaque « case » ressemble plus ou moins à sa voisine et on se repère plus grâce à la carte présente sur l’écran inférieur qu’en regardant directement la vue subjective de l’écran supérieur. On retrouve le character-designer attitré de la série, Himukai Yûji, et nos oreilles ne sont pas en reste non plus avec des musiques composées par l’immense Koshiro Yûzô (Space Harrier, Streets of Rage, Shenmue, Sonic… bon sang !). Notez qu’il est possible de basculer sur l’ancienne piste sonore dans les options, pour ceux qui seraient nostalgiques du « son » de la DS.
Bien débuter dans le donjon
Cinq conseils aux débutants :
- La fuite est toujours une solution : il n’y a rien de plus rageant que de perdre une heure d’exploration parce qu’un monstre trop costaud nous est tombé sur le râble inopinément. Un petit fil d’Ariadne (1) et hop, l’équipe rejoint la ville automatiquement (un objet à avoir en permanence dans votre inventaire lors de vos explorations). Notez qu’il est toujours possible de fuir un combat mal engagé, à quelques rares exceptions imposées par le scénario, un avertissement vous est généralement laissé avant ces affrontements.
- Le repos à l’auberge est incontournable : malgré son prix qui augmente de 5 pièces toutes les deux nuits, se reposer à l’auberge est toujours une bonne idée. Tous les personnages récupèrent vie et points de magie, et on débloque des saynètes sympathiques. Les points de magie (TP) peuvent se récupérer dans les donjons ou avec des objets extrêmement rares (ne faites pas comme moi et ne gaspillez pas vos Amritas !).
- La récupération de matériaux est LE business du coin : pour se faire de la thune (et pouvoir payer le coût toujours plus élevé de l’auberge), rien de tel que la cueillette/le minage dans certains spots du labyrinthe. N’hésitez d’ailleurs pas à augmenter les compétences respectives de vos personnages pour augmenter vos chances de tomber sur des matériaux rares (donc, qui rapportent plus). De plus, vendre des matériaux débloque de nouveaux équipements.
- Vendez vos équipements : en mode Histoire, vos personnages sont fixes, vous n’en recruterez pas d’autres et vous n’avez donc aucun intérêt à garder des équipements obsolètes. Leur revente vous permet souvent d’en acheter un autre plus intéressant.
- Prudence est mère de survie : le labyrinthe est un endroit hyper dangereux et en cas de doute, il vaut mieux retourner en ville, sauvegarder et se préparer à affronter un truc balèze, plutôt que de foncer dans la mêlée. Croyez-moi, c’est du vécu.
Etrian Odyssey 2 Untold – The Fafnir Knight (c’est bien parce que c’est la conclusion que je me fais suer à le taper en entier) est probablement le meilleur épisode pour découvrir la série : le mode Histoire balise très bien la progression sans la brider, les nouveaux adoucissements de la difficulté rendent l’expérience moins frustrante qu’avant et la profusion de mécaniques de jeu le rend immédiatement addictif. Pour celles et ceux qui sont rompus à l’exercice, le mode Classique leur tend les bras et les nouvelles mécaniques (ainsi que la refonte visuelle et sonore) suffisent à justifier une nouvelle plongée dans l’univers chatoyant de l’Arbre Yggdrasil. De plus, pour patienter avant la sortie prochaine de l’épisode 5, cet Untold 2 (faut pas déconner, une fois mais pas deux) est un parfait substitut pour tous ceux qui sont en manque de combats contre des boss velus et d’exploration de labyrinthes blindés de monstres…
Go-Ichi
Points forts :
- Un remake soigné tant sur la forme que le contenu.
- Une difficulté adoucie et un mode Histoire parfait pour débuter.
- Des combats de boss ardus et tendus.
- Une profusion de mécaniques sympathiques.
Points faibles :
- Un Etrian Odyssey reste un jeu difficile et impitoyable.
- Uniquement en anglais.
La Note Gamingway : 18/20
La Note Gamingway : 18/20
Développeur : Atlus
Éditeur : Nintendo
Genre : Dungeon-crawler
Support : 3DS
Date de sortie : 12 février 2016
(1) Oui, l’objet se nomme bien « Fil d’Ariadne » et pas « Fil d’Ariane ». Une sombre histoire de droits avec le Minotaure…