Test : Absolver (PC)
S’attaquer à un genre déjà ancien et très codifié pour le renouveler semble être une tâche insurmontable. C’est pourtant le défi relevé par Sloclap qui tente de revisiter le jeu de combat avec Absolver.
Le genre du jeu de baston est généralement représenté par deux sous catégories : le beat’em all et le jeu de combat à deux (que nous nommerons ici Versus Fighting pour une question d’ordre pratique). Les deux catégories se sont souvent croisées, mais assez rarement pour le meilleur. Les parisiens du studio Sloclap essaient à leur tour de réunir les genres tout en proposant des mécaniques de jeu novatrices.
On va pas en faire toute une histoire
En digne héritier d’une longue tradition de jeu de bagarre, Absolver ne brille pas par la qualité de son scénario, un élément somme toute anecdotique pour ce genre. Cependant, cela ne signifie pas que le mode « solo » est inexistant, bien au contraire. Il vous faudra aller au bout de votre quête (qui sert aussi de tutoriel géant) afin d’améliorer votre personnage et le rendre viable en combat contre d’autres joueurs. Votre héros se verra dans l’obligation d’arpenter la région d’Adal et tabasser tout ce qui passe s’il veut gagner expérience et équipement. Au-delà d’un simple beat’em all, ce mode story va donc vous permettre de vous préparer au vrai cœur du jeu qui se trouve au bout du chemin, suivant ainsi le principe du contenu high end bien connu des joueurs de MMORPG. Ce concept est à la fois l’une des grandes forces du jeu, mais également l’un de ses pires défauts, mais nous aurons l’occasion d’y revenir.
Six doigts, c’est le minimum
Il est important de prévenir : Absolver n’est pas un jeu facile. Sous ses faux airs de petit beat’em all indé se cache un gameplay profond et extrêmement exigeant, un niveau d’exigence qui risque d’ailleurs de faire rapidement fuir les curieux qui pensaient se lancer dans un jeu de baston détente lambda. Plus qu’un jeu de combat classique, les développeurs ont orienté leur titre vers une dimension « simulation. » S’il ne s’agit pas à proprement parler d’arts martiaux réels, le gameplay et le panel de mouvements des personnages est bien plus poussé que dans la plupart des titres du genre. Afin que vous saisissiez mieux le principe, il me faut vous décrire le maniement de l’avatar ; accrochez-vous, c’est un peu technique.
La mécanique du combat repose sur un système de decks que vous devez construire tout au long de l’aventure en apprenant de nouveaux coups et en choisissant l’ordre d’enchaînement de ces derniers (rappelant un peu le gameplay de Remember me de DONTNOD). Ensuite, vous pouvez positionner votre personnage dans l’une des quatre stances proposées (s’apparentant à une simple orientation du corps), sachant que chacune de ces stances influe sur l’attaque de départ. Pour schématiser, imaginez que la stance 1 va lancer l’attaque A qui va finir dans la stance 2 et vous permettre de lancer l’attaque B, etc. Le coup que vous portez va ainsi placer votre personnage dans une position qui va conditionner l’attaque suivante et donc la stance suivante. La constitution de votre deck vous permet de créer un schéma de combat. Ce système serait extrêmement redondant s’il n’existait pas la possibilité d’ajouter un coup alternatif à chaque enchaînement afin de changer la position de fin de votre attaque, installant de ce fait une dimension stratégique dans les affrontements. Pour éviter tout spam de boutons, vos coups consomment de l’endurance, tout comme vos blocages ou esquives et bien évidemment, ne plus avoir d’endurance est la garantie de voir sa barre de vie fondre comme neige au soleil.
À cette mécanique déjà relativement pointue vient s’ajouter votre style d’art martial qui va essentiellement jouer sur la défense. Cet art peut par exemple vous permettre de dévier les attaques ou absorber des coups et vous rendre de l’endurance. Il se déclenche à l’aide du stick droit et devra être orienté en fonction de l’attaque adverse, nécessitant de votre part une bonne dose d’observation. Vous disposez également de pouvoirs (soins, protection, etc.) qui se chargent durant les affrontements.
Maintenant, imaginez qu’en plus de tout ça il existe la même chose pour le combat aux armes (mitaines et épées), donc deux decks de plus à constituer. Si vous êtes arrivés jusque là, vous pouvez souffler, le plus difficile est passé.
Dans quel état j’erre ?
Du point de vue de l’innovation pure, le défi est brillamment relevé par Sloclap, une vraie découverte de chaque instant. Après, le bilan n’est pas parfait pour autant, il y a un certain nombre de choses à redire. Comme je l’ai évoqué en début de critique, le mode story sur lequel repose une partie du game design porte en lui de gros défauts. En tout premier lieu, le principe du farming intensif pour améliorer son personnage peut s’avérer extrêmement rébarbatif, d’autant qu’il est obligatoire, car il permet d’apprendre de nouveaux coups et donc de personnaliser ses decks de combat. Un joueur qui aimerait s’essayer au PVP direct ne peut absolument pas le faire sous peine de défaite express. Ensuite, le PVE est axé sur les affrontements en mêlée, mais le système de combat, aussi complet soit-il, n’est pas du tout adapté. À tel point que l’on fini bien souvent par trouver des astuces pour enchaîner frappe et fuite. Il faut également mentionner le fait que certaines explications des mécaniques sont loin d’être limpides, au risque de perdre les moins motivés des joueurs.
Pour être tout à fait honnête, j’ai bien mis une à deux heures avant de réaliser toute la profondeur du titre, me demandant même si j’allais m’acharner plus longuement. Cependant, une fois que l’on commence à maîtriser un minimum son avatar, les timings des enchaînements et son style de combat, tout devient fluide, très agréable à jouer. Les premières et douloureuses phases d’apprentissage passées, il est temps de profiter pleinement de la magnifique direction artistique, ainsi que de l’OST discrète mais si parfaite.
Arrivé au bout des quelques courtes heures nécessaires à boucler le scénario, on se sent réellement capable d’affronter d’autres joueurs et à ce moment là, ce que l’on a assimilé prend tout son sens, un vrai plaisir. Il est d’ailleurs possible de rencontrer les autres joueurs directement pendant la progression du scénario, pour peu que l’on joue en ligne, mais c’est assez vite la foire à la saucisse et il n’est pas rare d’être sauvagement agressé dans le dos, alors que l’on est déjà aux prises avec un groupe de PNJ. Je conseille vraiment de jouer en mode offline jusqu’à finir la partie solo, c’est bien plus agréable.
La vraie question est de savoir si Absolver, symbole même du jeu de niche, saura fédérer une communauté importante, sans quoi il ne survivra pas à la désertification des serveurs. N’oublions pas qu’il s’agit d’un jeu de combat en ligne et que contrairement à un Street Fighter, il est impossible d’organiser une soirée bagarre sur le canapé.
Sur ce, je retourne travailler mes stances, histoire d’arrêter de manger le sol durant mes duels.
Ominae
Points forts :
- Le système de combat tout simplement divin
- La direction artistique
- L’exploration du monde
- L’OST
Points faibles :
- Le grind obligatoire et long
- Le combat de mêlée
- Parfois un peu trop d’inertie dans les mouvements
La Note : 17/20
La Note : 17/20
Développeur : Sloclap
Éditeur : Devolver Digital
Genre : La bagarre
Date de sortie : 29 août 2017
Support : PC, PS4, Xbox One
Configuration machine de test : i7-4790K, GeForce GTX970, 16GB RAM