Test : Night Call (PC)

La scène indépendante nous a offert quelques perles d’écriture, ces dernières années, et c’est au tour de Monkey Moon et Black Muffin de proposer leur propre expérience narrative. Avec Night Call, ils explorent un nouveau genre d’enquête aventure.

Présenté sur les différents salons depuis la Gamescom 2018, Night Call avait tapé dans l’œil d’un peu tout le monde ; d’abord par son esthétique ultra léchée et son ambiance roman noir. Après une version de démonstration fort avenante, et maintenant que le titre est sorti, il est temps de voir s’il se révèle à la hauteur de la promesse.

Plus Simenon que Besson

Night Call place le joueur dans la peau d’un chauffeur de taxi de nuit parisien, une première dans le jeu vidéo. Un chauffeur avec un passé compliqué qui va le conduire à être manipulé par la police et l’obliger à participer à une enquête criminelle. Vous aurez, dès le début de la partie, le choix entre plusieurs affaires au fonctionnement identique, six nuits durant lesquelles il vous faudra récolter des indices afin d’identifier un tueur en série sévissant dans la capitale. Alors que les clients se relaient à l’arrière, votre chauffeur va récolter des indices, mais également rentrer dans l’intimité de ces anonymes. Renforcé par une esthétique sombre du plus bel effet, le jeu immerge le joueur dans une ambiance roman noir des plus réussie.

C’est beau une ville la nuit

Night Call se déroule en deux phases de gameplay distinctes. La première consistant à parcourir la ville en quête de clients, mais également de lieux d’intérêt et de stations essence. La seconde partie se déroulant, quant à elle, dans votre appartement, devant votre bureau et les éléments récoltés.
Les deux séquences sont soumises à une jauge de temps, limitant le nombre d’actions ou de déplacements que vous pouvez effectuer. Il faudra aussi jeter un œil à la jauge d’essence, mais cette dernière est surtout liée à une autre mécanique de jeu, la gestion de votre budget.
Parce que oui, la vie de taxi ce n’est pas que les grosses têtes à la radio et des discussions météo, c’est aussi un vrai travail et il va sacrément falloir cravacher si vous voulez maintenir votre compte à flots.
Chaque nuit, le principe est le même, on transporte des clients, on discute (ou pas), on récolte indices et argent, puis retour à l’appartement afin d’analyser les pièces du dossier, se faire une idée sur le profil du tueur.

Thérapie Taxi

S’il y a bien une chose qui fonctionne dans Night Call, c’est sa partie dialogues, les rencontres avec les clients. L’écriture est d’une justesse folle et certaines histoires arrivent à jouer de façon terriblement efficace avec les émotions. Alors que la plupart des jeux narratifs en font des caisses et empilent bien souvent les clichés, ici tout semble cohérent, les personnages vivants. On regrettera peut-être ces quelques moments qui nous sortent du réalisme avec des protagonistes décalés ou sortis d’univers fantastiques.
Les histoires de ces anonymes sont aussi très variées avec 75 PNJ recensés dans votre « passidex » (même si cela s’avère, au final, un peu plus compliqué). Les sujets sont nombreux, très actuels, très politiques également et ça fait un bien fou.
Ce qui fonctionne moins bien au niveau de ces rencontres, par contre, ce sont les indices récoltés durant les conversations. Ces derniers sont totalement piochés au hasard et n’ont, sauf passages clés, aucun rapport avec le dialogue. C’est dommage, car ça casse un peu l’immersion apportée par l’écriture générale.

Un air de déjà vu

Si les profils des passagers sont nombreux et variés, on ne peut pas vraiment en dire autant des enquêtes elles-mêmes. Il existe trois scénarios différents, mais leurs déroulements sont identiques en tous points. L’idée n’est pas mauvaise sur le papier, proposer plusieurs histoires doit théoriquement permettre de dialoguer avec d’autres voyageurs et ainsi profiter encore de ce qui fait la force du titre, mais le système aléatoire rend les choses moins simples.
Afin d’illustrer d’un exemple, lors de ma seconde partie, la quasi totalité des clients étaient ceux que j’avais croisés lors de ma première enquête. Sur 75 PNJ, c’est un hasard malencontreux, mais ça reste très pénible lorsque cela arrive. J’ai dû relancer une partie après la quatrième nuit, car il devenait ridicule de relire les mêmes choses. Bien que certaines histoires soient passionnantes, il parait peu probable que les joueurs refassent inlassablement les trois mêmes affaires dans le but de compléter le « passidex. » 

Jojo le taxi ?

Je ne vais pas vous mentir, j’attendais beaucoup de Night Call et le résultat final s’est montré un poil décevant. La répétitivité des rencontres et les mécaniques d’enquête un peu forcées rendent le voyage un peu moins enivrant qu’il aurait pu l’être. La question du gameplay financier pose aussi soucis, on ne sait pas trop bien à quoi il sert, si ce n’est pouvoir causer la fin prématurée de la partie en cas de déficit important. Le truc, c’est que le système n’est pas très équilibré, et surtout, n’apporte pas de vrai intérêt dans le jeu. On dirait un ajout destiné à créer une couche supplémentaire de gameplay, comme pour étoffer l’ensemble. On notera également la présence de quelques bugs parfois bloquants, mais qui seront certainement corrigés lors des mises à jour à venir.
Donc, me voilà un peu déçu, mais le bilan n’est pas non plus catastrophique, loin de là. L’expérience est vraiment prenante, même si assez courte si l’on ne supporte pas la redondance ; comptez entre deux et trois heures par enquête, environ.
Night Call n’en demeure pas moins une belle aventure, à l’habillage magnifique et une OST de Corentin Brasart extrêmement réussie. Un premier titre qui laisse présager de bonnes choses pour les futurs développements des studios.

Ominae

Points forts :

  • Une esthétique BD sublime
  • Une écriture d’une justesse incroyable
  • L’OST
  • L’ambiance immersive

Point faibles :

  • Trois enquêtes identiques
  • Le système de budget un peu hors sujet
  • Des bugs irritants

La note : 16/20

Développeur : Monkey Moon & Black Muffin
Éditeur :
Raw Fury
Genre :
Aventure narrative, Enquête
Support :
PC
Date de sortie :
17 juillet 2019

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