Test : Hotline Miami 2 Wrong Number (PC)

hotline-miami-wrong-number-0Le premier Hotline Miami avait surpris le petit monde du jeu vidéo lors de sa sortie fin 2012 : gameplay nerveux, difficulté relevée, ultraviolence stylisée, bande-son électro qui tabasse…

Du fait de sa radicalité tout azimut, ce premier titre du tandem Dennaton a eu l’effet d’un électrochoc dans la sphère indépendante et son succès commercial a propulsé l’éditeur Devolver Digital sur le devant de la scène. Alors, est-ce que le miracle va se reproduire avec ce second (et ultime) épisode ?

DROP THE BEAT

Je ne vais pas tourner autour du pot : Hotline Miami 2 Wrong Number est une pépite que tout joueur se doit, sinon posséder, au moins essayer. La recette « bigger and louder » a été scrupuleusement appliquée pendant les deux années et demie qu’a nécessité le développement du jeu : plus de personnages, plus de narration, plus de niveaux, plus de difficulté, plus de musique qui tabasse… Bref, plus de tout – jusqu’à l’overdose, diront certaines mauvaises langues – pour notre plus grand plaisir.

Car l’un des points faibles du premier était justement son contenu, un peu léger : une quinzaine de niveaux dont seuls les derniers proposaient un véritable challenge, une fois les mécaniques de jeu maîtrisées. De ce côté, sa suite est nettement plus généreuse : environ 25 niveaux, tous très grands et dont la difficulté se fait sentir dès ses premières missions. En ce sens, les deux jeux sont quasiment indissociables : il vaut mieux se faire la main avec le premier jeu, avant de lancer le deuxième.

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Dans le premier Hotline Miami, le joueur incarnait Jacket, un tueur faisant le ménage dans les rangs de la mafia russe, dans un Miami fantasmé des années 80 (un twist en fin de parcours venait remettre en question les événements précédents, mais chut, spoilers). La suite prend le parti de raconter de multiples histoires qui s’entrecroisent, s’interrompent ou parfois n’ont aucun lien apparent entre elles, sinon ces mystérieux coups de téléphones donnant l’adresse du prochain carnage à exécuter.

L’histoire commence avec un acteur qui tourne un film de série Z inspiré des événements du premier jeu, puis passe à une bande de « fans » de Jacket ou encore à un soldat posté à Hawaii qui enchaîne des missions toujours plus meurtrières… D’autres personnages viendront s’ajouter à l’aventure, complexifiant grandement une intrigue de base pas très claire : la plupart des personnages sont sujets à des hallucinations, un complot est ourdi  dans l’ombre par des forces étranges, et les incessants flashes-back et flashes-forward ajoutent à la confusion des événements décrits. Toutefois, ce maelstrom narratif correspond parfaitement à l’ambiance délétère et déjantée de cette histoire à base de carnages gratuits, de racisme anti-russe et de patriotisme américain bas du front : le tourbillon de violence (visuel et sonore) répond naturellement à cette construction narrative foutraque et nébuleuse, sans que des réponses claires ne soient données en fin de parcours. Évidemment, beaucoup n’apprécieront pas ce détail (ce qui n’est pas mon cas).

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FISTS OF FURY

Le gameplay de base n’a pas changé : il faut toujours éliminer l’ensemble des ennemis présents dans un niveau, dans un die and retry opératique où chaque coup reçu est létal, sur bande-son regroupant la crème de la scène électro et à l’aide d’un arsenal ridiculement diversifié. La trentaine d’armes disponibles (qui va du couteau papillon au lance-flammes, en passant par la fidèle batte de baseball et le pistolet silencieux) permet de varier les plaisirs et les approches de chaque niveau. Cependant, il existe certaines missions qui vous placeront dans une situation très spécifique, limitant votre marge de manœuvre : un personnage est incapable de tuer les ennemis, un passage vous impose de vous planquer derrière des éléments de décor sous peine de se faire faucher par une rafale de mitraillette… Wrong Number apporte une grande variété de situations, venant briser une éventuelle monotonie dans l’enchaînement des missions, tout en proposant une intensité qui va crescendo, jusqu’à culminer lors de morceaux de bravoure tout bonnement épiques. Cela étant dit : SPOILERS.

Les niveaux de cette suite sont nettement plus grands (la plupart se déroulent sur trois ou quatre étages différents) et le nombre d’ennemis est l’avenant : raison de plus pour refaire un niveau plusieurs fois, car la première run se soldera systématiquement par un score minable. La taille élevée des écrans de jeu oblige malheureusement à souvent recourir à la caméra pour jeter un coup d’œil en amont et découvrir le reste du niveau : cela a pour conséquence de hacher le rythme des premières parties, mais ces à-coups disparaissent une fois le niveau maîtrisé.

Certes, la technique consistant à tirer une balle dans un mur et faire un carton fonctionne toujours, mais pénalise le joueur lors de l’évaluation finale. Toutefois, obtenir un bon score n’impactera pas la progression dans le jeu, puisqu’il suffira de survivre à un niveau pour en débloquer le suivant. Cette caractéristique s’adresse donc principalement aux super-players et autres speedrunners, avides de faire péter les highscores. Une bonne connaissance du niveau, des rondes ennemies et une excellente capacité d’improvisation seront nécessaires pour espérer obtenir le sacro-saint « A+ » en fin de mission.

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Et comme dans le premier jeu, chaque fois que l’on termine une mission, il faut repasser par les écrans où gisent les corps massacrés de nos ennemis, dans un silence pesant, nous faisant prendre conscience de la monstruosité de nos actes. De plus, avec l’introduction du personnage de l’écrivain (qui, de base, ne tue pas les ennemis), le discours sur la violence se fait plus nuancé et moins complaisant que certains détracteurs cherchent à le faire passer.

Oui, Hotline Miami 2 est un jeu ultraviolent, mettant en scène des psychopathes qui n’ont quasiment aucun remords quant à leurs actions (certains y prennent visiblement du plaisir), mais il est surtout une expérience nihiliste qui cherche à sonder les recoins les plus obscurs de l’âme humaine : ainsi, il revient au joueur de choisir si l’écrivain acquiert la capacité de tuer ou s’il se contente de neutraliser les ennemis, augmentant de fait la difficulté de ses missions. Un détail qui vient flouter encore un peu le rapport nébuleux qu’entretient le jeu avec la violence et la caution d’actes barbares.

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DO YOU LIKE HURTING PEOPLE ?

Autre différence notable avec l’original, les masques. Le premier jeu nous donnait le contrôle d’un personnage dont les capacités changeaient en fonction du masque qu’il portait. Un pour rendre ses coups de poings létaux, un autre pour se rendre plus difficilement détectable des ennemis, ou encore un autre qui plongeait le niveau dans le noir… Il y en avait une vingtaine à débloquer afin de changer légèrement les règles du jeu : ce déblocage progressif incitait à refaire les niveaux pour obtenir un meilleur score, car l’obtention de nouveaux masques dépendait de ce dernier.

Dans ce nouvel épisode, les capacités sont associées à des personnages et non des masques : il y a le fan au masque de zèbre qui peut effectuer des roulades, un couple de personnages où l’un est équipé d’une tronçonneuse et l’autre d’un revolver, un soldat avec un arsenal qui va de la mitraillette au lance-flammes… Incidemment, il y a moins de variété dans les capacités (certaines, comme les coups de poing mortels se retrouvent chez plusieurs personnages) même si cela n’est pas réellement une faiblesse : beaucoup des masques du premier n’avaient pas de réelle utilité (survivre à une ou deux balles, quel intérêt dans un jeu où le restart est instantané ?) ou n’étaient que des blagues de la part des développeurs (inverser les contrôles, traduire le jeu en français…). Dans ce Wrong Number, les capacités ont toutes leur utilité et modifient en profondeur l’appréciation d’un niveau : en effet, la stratégie n’est pas la même quand on peut se servir d’une arme à feu, ou uniquement de ses poings, ou quand une arme ne peut être rechargée.

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Comme dans le premier, la bande-son occupe une grande place dans l’appréciation du jeu et dans son côté jouissif : les morceaux de PerturbatorCarpenter BrutM|O|O|N ou encore Jasper Byrne (l’OST complète compte 49 titres !) rendent parfaitement le sentiment de puissance, de nervosité et de folie des personnages que l’on incarne, tout en plaçant le joueur dans un état hypnotique, proche de la « Zone » (ce moment où l’on arrête de conscientiser ses actions et que l’on se laisse guider par son instinct) à mesure que l’on apprend la disposition des lieux et que le carnage vire à la chorégraphie millimétrée.

Le jeu regorge également de petits secrets et succès à débloquer pour avoir le (presque) fin mot de l’histoire : des documents à lire sont planqués dans certaines séquences et de discrets éléments interactifs (comprendre : sur lesquels vous pouvez taper) sont disséminés dans les niveaux. Il faudra bien inspecter chaque recoin pour les trouver, ceux-ci se fondant parfaitement avec le décor… Un mode « Hard » se débloque une fois le jeu bouclé une première fois, pour les furieux qui souhaitent compliquer encore plus une expérience déjà bien corsée.

Au registre des menus défauts, on notera que les bugs liés aux portes du premier n’ont pas été réglés : selon le timing avec lequel vous tirez, il se peut que votre tir soit complètement annulé par un pixel de porte se trouvant sur la trajectoire. Les ennemis ont aussi tendance à se bloquer dans ces dernières et devenir invulnérables. Rageant mais pas rédhibitoire. Autre défaut : l’IA défaillante des ennemis qui peut amener à des situations improbables ou imprévisibles (un ennemi qui vous détecte à l’autre bout du niveau ou, au contraire, qui ne vous voit pas à deux centimètres devant lui). Toutefois, rien dans ces défauts ne vient gâcher une expérience de jeu fluide en toute circonstances, quelle que soit la machine utilisée.

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WEAR SOMETHING FANCY

Hotline Miami 2 Wrong Number est une réussite éclatante pour peu que l’on se laisse porter par son ambiance nihiliste et son propos subversif. En conséquence, il s’adresse en priorité à un public adulte, le titre n’étant pas avare en séquences trash et son ultraviolence revendiquée ne conviendra pas à tout le monde. Ses mécaniques sont toujours aussi addictives et jouissives (la mort n’est pas une sanction, le restart est instantané), rehaussées par une OST complètement dingue rassemblant les meilleurs artistes électro du moment (ce morceau est fantastique). Le contenu du jeu de base est plus que généreux et un éditeur de niveaux est prévu pour le mois d’avril, afin de donner à la communauté les moyens de prolonger à l’infini cette expérience singulière. Un mot comme en 1800 (soit la totalité de cette critique) : INDISPENSABLE.

Go-Ichi.

Points forts :

  • Gameplay exigeant.
  • Bande-son de folie.
  • Contenu conséquent.
  • Challenge au rendez-vous.
  • Une suite aussi indispensable qu’indissociable de l’original.

 

Points faibles :

  • Des bugs gênants (ces satanées portes).
  • Réservé à un public adulte, et déconseillé à ceux qui n’aiment pas la difficulté ou l’électro boum-boum.

 

La Note Gamingway : A+/20

Développeur : Dennaton Games
Éditeur : Devolver Digital
Genre : Carnage chorégraphié
Supports : PC, PS4, PS Vita

Date de sortie : 10 mars 2015

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