Catherine Full Body est sorti au Japon : on fait péter les spoilers transphobes

J’étais très en colère en septembre dernier en partageant un trailer du remake de Catherine. Je relayais notamment les craintes que pouvait avoir la communauté LGBTQ+ le concernant. Surprise : Atlus a répondu présent, il nous a même préparé un buffet royal. Spoilers en masse.

Il était 13h. Je prenais mon petit déjeuner tranquillement en survolant les dernières nouvelles du monde vidéoludique, quand je suis tombée sur une première vidéo pour la sortie européenne de Catherine Full Body. « Youpi, me dis-je, je vais pouvoir m’énerver dans différentes langues ». Le jeu venait de sortir ce 14 février au Japon sur Vita et PlayStation 4, mais je l’avais totalement oublié. « Mince alors, je suis de mauvaise foi, peut-être qu’ils se sont rattrapés en fait ? ». Mon ricanement cynique fut puni de suite par un thé brûlant mes cavités nasales, bien fait pour moi. Un petit tour sur Reddit me donna finalement raison, j’étais en droit de rire, de pleurer, mais surtout de hurler. Je m’empare alors de mon ordinateur d’un mouvement sec, l’allume brutalement et ouvre Gamingway. Ça va suer du boudin sévère, je vous le dis. SPOILERS ALERT, JE SUIS ENRAGÉE, IL NE FAUT PAS ME CHERCHER.

On replace le cadre de l’histoire rapidement : un misogyne sexiste du nom de Vincent rencontre des problèmes conjugaux avec sa copine aux cheveux longs Katherine. Il se retrouve malgré-lui-juré-c’est-pas-sa-faute à la tromper avec la blondinette Catherine, vilaine succube bien perverse prélevant directement à la source l’énergie de ces pauvres mâles. Elle donne même des cauchemars à ceux qu’elle n’atteint pas physiquement. Avant que le lien entre madame C. et les vilains rêves ne soit effectué par le scénario, le groupe d’amis dont notre héros fait partie a eu le temps d’échanger sur leurs nuits agitées. Ils s’étonnent notamment que leur amie d’enfance Erica ait les mêmes, faisant d’elle la seule femme ciblée par ce phénomène… MAIS C’EST NORMAL, VU QU’ELLE EST TRANSGENRE, PLOT TWIST, C’EST PAS UNE VRAIE FEMME EN FAIT. Un peu de sexisme par-ci, un peu de transphobie par-là, le fond était touché.

Eh bien non. Voici Qatherine, mieux connue sous le nom de Rin, le nouveau personnage du remake de ce hit de 2012. Les joueurs supposaient aux premières images et vidéos une potentielle transidentité mal assumée : il n’y a qu’à jeter un œil au désespoir que semble éprouver Vincent à la vue des parties génitales de la dame aux cheveux roses pour se dire qu’elle est la définition même du piège. Les artworks promotionnelles n’aidaient pas non plus, par ailleurs :

Mais que peut bien se cacher derrière cette jupe ? Je vous le donne en mille, mais de manière propre et ce malgré mes pulsions parce que je tiens à mon poste : une ZIGOUNETTE. On ne s’y attendait pas, nous voilà rassurés, Atlus a toujours autant de problèmes avec la transidentité. Elle est bien le choix romantique compliqué prévu, reléguant Erica au rang de blague potache, impossible de faire pire.

Ben si, en fait.

Rin n’est pas une femme transgenre, mais un cross-dresser, un garçon-fille…  Otoko no Ko [男の娘] dans le texte original. Transidentité est donc une fois de plus confondue avec travestissement et le jeu joue la carte de l’ambiguïté jusqu’à la scène finale ou presque. On se rassurera en se disant qu’elle est en fait une extraterrestre (pour de vrai) et ne fait donc pas partie de la race humaine… Ou plutôt, après réflexion, C’EST ENCORE PIRE MÉTAPHORIQUEMENT PARLANT.
Je fulmine. Laissez-moi reprendre ma respiration et mon Xanax.
Le premier niveau de lecture serait qu’un homme aimant porter des habits connotés féminins ou adopter une attitude qui n’est pas en accord avec ce qu’il a entre les jambes n’est pas normal. Il doit attiser la peur, cherchant à berner ces pauvres petites proies innocentes que sont les hommes cisgenres hétérosexuels. Mais si on ajoute à ça la confusion qu’installe le titre entre ces personnes et les femmes assignées hommes à la naissance, il n’est pas capillotracté de déclarer qu’Atlus considère ces dernières comme des aberrations étranges venant d’une autre planète. Une seule mission pour elles, duper ces messieurs. On dépasse le niveau de la petite blague sur l’importante virginité que Toby a perdu aux mains d’Erica pour passer au stade supérieur : l’insulte directe envers la communauté queer. Bien joué, on ne l’avait pas vu venir.

Au fait, Catherine la croqueuse d’hommes a acquis le pouvoir de voyager dans le temps et nous donne ainsi la chance de voir longuement la fameuse Erica pré-transition. Parce qu’annoncer son deadname n’était visiblement pas suffisant, le jeu nous présente un monde alternatif plus joyeux, où tout se serait bien fini pour tout le monde… Un dans lequel elle n’a jamais transitionné. Je ne partagerai aucune vidéo, je risquerais de détruire mon ordinateur.

Catherine Full Body est prévu pour le 3 septembre 2019 sur PlayStation 4 chez nous. Des autodafés vidéoludiques sont prévus à cette occasion, en face de tous les revendeurs de France.

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