Interview : Thai Thanh Phong, cofondateur de Guava7
Dans mon tour du monde du jeu vidéo, je n’avais pas encore abordé le Vietnam. Pays qui commence à émerger dans ce milieu, notamment par la présence d’une importante société française, mais aussi d’indépendants passionnés. J’ai justement voulu vous faire découvrir quelqu’un connaissant ces deux voies, Thai Thanh Phong !
Gamingway : Salut Phong, peux-tu te présenter, ainsi que ton parcours, pour commencer ?
Salut Inod et Gamingway. Je suis originaire du Vietnam. J’ai eu la chance de toucher à un ordinateur, un 80386 tournant sur MS DOS, en 1994 à l’âge de 15 ans.
Il s’agissait de celui de mon oncle. A cette époque, les ordinateurs étaient encore quelque chose de nouveau pour une majorité de vietnamiens. J’en suis tombé raide dingue au premier regard !
Il m’a fait découvrir quelques commandes basiques de MS DOS, plus tard j’ai avidement et passionnément appris et enseigné à moi-même des techniques avancées du système d’exploitation, bidouillant des logiciels, utilitaires…
Puis la curiosité de savoir comment les logiciels sont créés est arrivée, donc je me suis lancé frénétiquement dans la programmation : QBasic, Foxpro, Pascal, C, Assembly.
Contrairement à aujourd’hui, il n’y avait que quelques livres à propos des ordinateurs et de la programmation à cette époque, mais ça ne pouvait pas stopper ma passion, j’ai exploré les choses tel un enfant.
Avant 1994, j’avais joué aux NES/SNES dans une salle de jeux de mon village, ça m’a rendu accro aux jeux : Tetris, Contra, Super Mario Bros., Legend of Kage, etc… pour en citer quelques-uns.
J’ai gardé ma passion pour la programmation et les jeux vidéo jusqu’à ce que j’entre à l’université, afin d’étudier l’ingénierie informatique.
En 2005 j’ai eu la chance d’obtenir un job chez Gameloft Vietnam. J’y ai travaillé durant six ans et demi, allant du rôle de programmeur, à formateur, chef d’équipe et à la tête du département lors des deux dernières années. J’ai quitté mon emploi fin 2011 et ai démarré un autre voyage.
En plus de la programmation et des jeux , j’adore également la technologie, la science, les animés, la guitare classique (je suis capable d’en jouer un peu) et prendre des photos.
Gamingway : Et maintenant Guava7 ?
J’ai cofondé Guava7 en janvier 2012, avec un ami ayant également travaillé chez Gameloft.
Nous souhaitions créer quelque chose par nous-mêmes, devenir indépendant, même si nous savions qu’il s’agirait d’un parcours semé d’embûches.
Au départ, il y avait nous deux plus un artiste 2D, puis un game designer nous a rejoints à bord. Désormais notre équipe est composée de huit personnes.
Mon rôle actuel concerne principalement le business et le management, mais en tant que petite équipe indépendante, je contribue aussi aux idées, au design, à la technique…
Notre première création fut Number Rush, un petit logiciel pour iPad. Nous avons tiré l’idée d’un jeu de pen and paper de notre enfance. Il ne s’agissait pas d’un hit, ni un jeu des plus mis en vue, mais nous en étions très fiers et il a été bien accueilli et apprécié par de nombreux personnes.
Gamingway : Peux-tu aborder les diverses sorties de Guava7, afin de donner envie à nos lectrices et lecteurs d’y jouer ?
Après Number Rush, nous avons continué à réaliser de nouveaux softs, qui sont désormais présent sur iOS et Android.
Cela comprend :
- Cerberus : The Puppy – un puzzle dans lequel vous vous servez d’outils fournis en quantité limitée, afin de construire un chemin pour le mignon chien devant attraper et rapporter des orbes à son maitre Hadès.
- Zombie Minefield – un tower defense dans lequel vous utilisez des mines et des bombes pour arrêter l’invasion de zombies et de vampires.
- Game For Two – celui qui a de loin connu le plus de succès, avec plus d’un million de téléchargements et sélectionné treizième dans le classement des quarante meilleurs logiciels iPad par CNET. Il s’agit d’une collection de minis jeux au design minimaliste : Caro (Gomoku), Othello, Dames, Conquer (Pipopipette), Co Ganh (jeu d’échecs traditionnel vietnamien), Tiling et Coloring (nous avons créé notre propre gameplay pour ces deux-là).
- Sweet Madness – notre dernier en date, qui a également été plutôt bien accueilli par les utilisateurs.
Gamingway : En avril dernier, Guava7 était présent lors de l’évènement GamesInAsia Meetup. Que faisiez-vous là-bas ?
GamesInAsia est un site indonésien assez connu traitant du jeu vidéo, intéressant les lecteurs de toute l’Asie. Dernièrement ils ont organisé un évènement sous forme de rencontre, invitant quelques orateurs à partager à propos du développement de jeux. Ils ont également convié des startups comme nous à présenter leurs produits. C’était amusant. Notre stand a attiré beaucoup de monde. Ils furent très excités en jouant à nos créations. J’en étais très heureux.
Nous y avons uniquement participé en tant que stand. Par le passé, j’ai également parlé lors d’autres évènements/conférences sur le développement de jeux.
Gamingway : Quelles furent les réactions du public par rapport à vos jeux ?
Comme je disais, certains de nos jeux ont été vraiment appréciés.
D’un autre côté, si nous parlons de notre « image » ou de « succès », nous n’en sommes pas encore là.
Mais le succès est un voyage, pas une destination. Nous avons toujours travaillé dur pour apporter de l’amusement à chacun.
Gamingway : Actuellement, êtes-vous en train de travailler sur de nouveaux projets et peut-être même de futurs évènements ?
Oui nous planchons sur un nouveau jeu, tout en mettant à jour et améliorant quelques anciens tels que Game For Two et Sweet Madness.
J’ai toujours désiré participer à des évènements internationaux sur le jeu vidéo comme Casual Connect, Tokyo Game Show, etc… mais je n’ai pas encore assez d’argent pour ça (rires).
Gamingway : Malheureusement, les médias français ne parlent absolument pas du jeu vidéo vietnamien. Peux-tu nous en faire découvrir davantage ?
Pas seulement les médias français mais les médias en général. L’industrie vidéoludique du Vietnam est encore jeune. Il reste beaucoup de choses à faire pour que le monde nous connaissent, même s’il y a eu quelques bons signes récemment.
Pour Guava7, nous sommes encore assez méconnus. Nous travaillons ardemment afin de créer des jeux de qualité, pour offrir du plaisir à chacun. J’espère que davantage de gens nous connaitrons, ainsi que nos logiciels.
Gamingway : Merci Phong pour cet entretien, désires-tu ajouter quelque chose à propos de Guava7 et / ou un message pour nos lectrices et lecteurs ?
Merci Inod et Gamingway. Merci de donner une chance à nos jeux, je pense que vous les adorerez ! Spécialement Game For Two, sa note moyenne est de trois étoiles sur l’AppStore français, mais ne soyez pas dupés par cela, c’est à cause de quelques bugs dans le passé qui faisaient planter le jeu, rendant certains utilisateurs mécontents. Il est désormais très bon, ne le ratez pas ! Merci à vous.
Interview réalisée par Inod – mai 2014 (par e-mail)
Le site de Guava7
Compte Twitter de Guava7
Page Facebook de Guava7
Il faut effectivement parler plus du jeu vidéo vietnamien, et pas seulement pour le très controversé Flappy birds…
Il y a de nombreux talents là bas, beaucoup sont passés par « l’école Gameloft »… Il n’y a qu’à voir les nombreux studios indépendants qui ont été créés par des anciens, ou qui sont ensuite partis chez des concurrents moins connus, mais tout aussi développés.
Phong est une personne extraordinaire, ainsi que les gens avec qui il travaille.
Congrats pour cet article!
Je ne vais pas hésiter à en reparler à l’occasion, mais d’autres pays vont déjà être évoqués d’ici là. En souhaitant que cela suscite toujours plus l’intérêt des joueurs.