Test : Chessaria : The Tactical adventure (PC)

Ah les tacticals… ces éternels ré-inventeurs du jeu de société le plus dénigré par la jeunesse en quête de divertissement abrutissant où tout doit exploser de plus en plus grand, de plus en plus fort et de plus en plus vite. En effet, le jeu d’échecs ne tient pas sa popularité du jeune public. Rare sont les petites têtes prêtes à faire face aux 64 cases blanches et noires et leurs pions au gameplay rigide et au combien manipulable. C’est peut-être parce que ces têtes sont de plus en plus petites qu’elles ne s’y attardent plus, car aux échecs, c’est dans la tête que ça se passe, plutôt que sur le terrain. Alors pourquoi des gens seraient assez fous pour transposer le mythique jeu en bois en jeu vidéo ? Eh bien qu’à cela ne tienne, les frenchies de Pixel Wizard ont encore espoir et tentent le coup en apportant à cet ancêtre un univers héroic-fantasy, des objectifs différents du « échec et mat » classique et des plateaux dynamiques dans Chessaria The tactical adventure, de quoi relancer l’intérêt des ignares dont je fais partie, pour tenter enfin de saisir certaines subtilités et pourquoi pas un jour affronter le grand Kasparov (oui enfin, on se calme hein…).

Sortir des cases

Les côtes de Chessaria jadis infestées de gobelins et d’orcs ont été nettoyées par les hauts-elfes en quête d’une nouvelle terre où prospérer. Alors qu’ils vivaient en paix depuis bon nombre d’années, un dragon venu du nord prend d’assaut Silveran, leur grande cité fraîchement bâtie. Nul doute que les races ennemies s’empresseront de profiter de cette brèche pour éliminer cette « invasion elfique » mais vous êtes là pour vous assurer du contraire.

C’est au long de pas moins de 100 plateaux que vous allez devoir reprendre le contrôle de la situation. Il ne s’agit pas là de faire 100 parties d’échecs, l’approche des règles se fait progressivement à travers des plateaux de jeu travaillés afin de scénariser votre avancée tout en apportant, pièce après pièce, les nuances de chacune d’entre elles. Ainsi, le plus novice apprendra les différences entre une tour, un cavalier, etc. dans des contextes beaucoup plus simples avec, dans un premier temps, des ennemis fixes et en récupérant l’équipement de leur unité avant d’aller les exterminer.

La base de Chessaria est le plateau d’échecs de 64 cases (8×8). Sur ces cases, les éléments de décor, les objectifs et les unités choisies par les développeurs apportent à chaque étape une variante qui vous forcera à penser différemment votre approche. En effet, vous n’allez pas avoir toutes les pièces à chaque fois et certaines cases seront parfois impraticables ou encore barricadées. Il faudra alors, dans le premier cas, trouver une autre voie pour atteindre la case suivante et dans le second cas, détruire cette barricade pour s’ouvrir le chemin.

Ainsi, vous devrez avec ce que l’on vous donne venir à bout des 100 niveaux que propose Chessaria avec différents objectifs : éliminer une cible précise, prendre le contrôle de certaines cases, protéger vos unités pendant un certain nombre de tours ou dans un temps limité, il se peut que des renforts arrivent d’un côté ou de l’autre etc.

Du noir et blanc à la couleur

Enrobé dans un visuel cohérent et enchanteur, Chessaria est un jeu qui nous met dans des chaussons. Vous traverserez la cité médiévale, la forêt mystique, les cavernes aux cristaux et autres souterrains nains bien connus de cet univers, qui plus est, de plutôt bonne facture, même si cela peut manquer de finesse par moments, notamment sur certaines unités. Chacun d’elle a d’ailleurs sa propre animation et ses effets visuels, mais sans en faire des caisses, ce qui est très agréable et permet de rester dans cet aspect « cocoon » qui englobe véritablement le jeu. Cependant, il y a parfois certains mélanges qui peuvent être gênants quand le sol est de la même couleur que le bleu de vos pions ou que certains effets se combinent avec des éléments de décor qui cachent une partie du plateau qui fait que l’on ne voit la pièce qui était derrière. Si l’on ne pense pas à utiliser la caméra pour voir ce qu’il se passe, on peut se faire surprendre. Les musiques sont elles aussi très discrètes, les développeurs y tenaient afin de ne pas perturber la concentration du joueur. Elles sont envoutantes et n’agacent pas, même après plus de 100 parties, sachant qu’il y en a une différente pour chaque zone, tout comme les plateaux qui prendront différents aspects et auront des éléments associés à la zone dans laquelle on se trouve.

Une bonne variété, donc, qui vient casser le côté très rigide du jeu d’échecs et rend l’ensemble très agréable à jouer. Une variété qui va cependant mettre à rude épreuve l’IA qui va parfois avoir du mal à s’adapter à l’objectif précis du tableau en cours. Il arrive par exemple que dans un niveau où votre cible est le cavalier adverse, l’IA reste en « mode classique » laissant son cavalier seul, démuni et livré à son inexorable sort. Il arrive aussi qu’au lieu de porter le coup de grâce, elle se focalise sur une autre action moins importante. Il est vrai qu’après une dizaine d’essais, alors que vous êtes à deux coups de réussir enfin, le fait que cette buse fasse ce genre d’erreur est très appréciable, mais c’est plutôt décevant lorsque cela arrive dans les derniers niveaux du jeu où l’on s’attend à du véritable challenge.

C’est peut-être là que Chessaria montre ses limites, les joueurs hardcore des échecs trouveront surement mille et une façon de venir à bout de toutes ces parties, mais en ce qui me concerne, il m’aura fallu une petite quinzaine d’heures avec ses doses d’énervement et de facepalm face à ma stupidité lorsque j’ai joué trop vite en laissant ma reine à portée d’un cavalier ou d’un fou, ainsi que quelques moments de surchauffe cérébrale pour trouver la méthode à appliquer. Il y a d’ailleurs la possibilité de rentrer en mode stratégique en reculant la caméra au maximum, les modèles 3D laissant place à une version beaucoup plus sobre vu du dessus avec uniquement les logos des pièces afin d’avoir une vision très claire de la situation.

Echecrèsbien ché crès crès bien

Enfin, le mode partie rapide permet de jouer en local ou contre l’ordinateur aux échecs classiques, bien sûr, mais aussi à tout un tas de variantes souvent dérivées de ce que l’on peut trouver dans la campagne. Il y a un mode horde où l’on fait face à 30 pions (il est aussi possible de jouer les pions), un mode barricade où les deux lignes du centre sont remplies d’objets, dont uniquement les vôtres sont destructibles, un mode bataille de pions dans lequel il faudra atteindre le camp adverse uniquement à l’aide de pions, le mode très original de course où le plateau prend la forme d’un U et dans lequel il faut atteindre le camp adverse avec uniquement un fou, une reine et une tour et enfin, le mode duel de mages qui demande d’envoyer un de vos fous dans les coins de l’adversaire. En bonus, il est possible de choisir sa faction (Hauts elfes, Elfes noirs, Orcs) et son plateau de jeu (qu’il faudra au préalable débloquer en terminant les zones de la campagne). Si l’ordi semble pouvoir être berné quand on s’y connait un peu, il va sans dire que jouer avec un ami est le plus intéressant, il faudra cependant inviter quelqu’un chez soi, car il n’y a pour le moment pas de mode online, mais n’ayez crainte, si vous choisissez vos amis correctement, ils ne devraient pas vous mordre et vous verrez que le local c’est bien meilleur ;).

Après une campagne kickstrater validée in-extremis, un travail respectueux du jeu d’origine et la réflexion derrière les différentes situations proposées, la petite équipe de Pixel Wizard s’en sort vraiment très bien pour leur premier jeu ! Un titre agréable pour les yeux et les oreilles, avec l’effort d’y apporter une histoire aussi classique puisse-t-elle être, facile d’approche et à la durée de vie plus que respectable. On aurait aimé que l’IA soit parfois un peu plus intransigeante, mais le sentiment d’avoir été plus malin que le jeu est bien là, en tous cas pour un noob tel que je le suis. Chessaria The tactical adventure est à recommander aussi bien à ceux qui n’y connaissent rien qu’aux experts qui seraient capables de ne pas être trop sévères. Les développeurs vont suivre le jeu et ne sont pas contre l’idée de faire quelques ajouts majeurs, comme un éditeur de niveaux, par exemple. Pour le moment uniquement disponible sur steam, il est fort probable qu’une sortie Mac, consoles et tablettes pointe le bout de son nez, donc si ça vous intéresse, manifestez-vous !

Biglova

Points forts :

– Très abordable pour les néophytes
– Soigné sur tous les aspects
– Bonne durée de vie et variété
– On s’y sent bien

Points faibles :

– L’IA parfois aux fraises
– Quelques soucis de lisibilité dans certains niveaux

LA NOTE : 17/20

Éditeur / Développeur : Pixel Wizard
Genre : Stratégie
Supports : Steam
Date de sortie : 8 mars 2018

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