Interview : Shiness (Japan Expo 2013)

shiness_logoJapan Expo offre une belle tribune à de jeunes talents. C’est l’occasion pour certains petits studios de se faire connaître, et Gamingway n’a pas manqué l’occasion d’interviewer le chef de Projet et le créateur de Shiness. Voyons donc immédiatement ce qu’ils ont à nous dire !

Gamingway : Bonjour messieurs, pouvez-vous vous présenter rapidement ?

Hazem Hawash : Chef de Projet pour le jeu vidéo Shiness.
Samir Rebib : Bonjour, directeur artistique et auteur de la bande dessinée Shiness.

Gamingway : Shiness est décrit comme un RPG en 3D orienté baston. Dans le monde des RPG, où déjà beaucoup de choses ont été faites, comment est-ce que vous comptez innover ou vous rendre un peu différent des autres ?

H.H. : En fait, on a un système hybride qui permet de faire des transitions entre une exploration avec des pouvoirs, des énigmes, des quêtes et un jeu de combat où là on a vraiment l’impression d’avoir un jeu de combat dans les mains. Il n’y a pas de chargement entre les phases d’exploration et celles de combat. Du coup, on a toujour la sensation d’être dans quelquechose de dynamique alors que dans la plupart des RPG, même aujourd’hui, on a des cassures en terme de timing. En revanche on ne prétend pas révolutionner le RPG en lui-même. Ce qu’on souhaitait faire, c’était quelquechose d’abordable pour tous. Pas de sortir un jeu destiné uniquement aux fans de RPG, mais un jeu qui s’adresse à tous. Du coup, on retrouve un peu des codes qu’on peut avoir dans un Zelda, un Final Fantasy, un Dragon Ball, un Naruto… C’est un petit mélange de tout ça.

Gamingway : Le monde est un monde féérique. Pour un RPG c’est assez classique. Justement, en quoi celui de Shiness est différent des autres ?

S.R. : En quoi il est différent des autres ? Ce n’est pas une question que je me pose très souvent. C’est une histoire que j’invente depuis que je suis gamin. Il y a beaucoup d’influences venant des RPG japonais :Skies of Arcadia, Secret of Manas, surtout des vieux jeux old school Super Nintendo (Final Fantasy V, VI) mais aussi dans les animés (Dragon Bann Naruto, Yuyu Hakusho). J’essaie de mélanger cet esprit féérique qu’on retrouve dans les RPG japonais à cet esprit un peu combatif qu’on retrouve dans les shônen. Après est-ce que c’est innovant ce n’est pas une question que je me pose.

H.H. : En fait on ne recherche pas l’innovation. Ce qu’on fait c’est faire adhérer les lecteurs, les joueurs, à un univers clairement original mais, qui, comme pour le RPG, ne révolutionne pas le shônen ou le côté aventure. Nous, ce qu’on cherche à faire, c’est simplement raconter une histoire. On veut le faire dans tous les détails possibles et imaginables.

Gamingway : Pour la partie artistique uniquement, avez-vous eu d’autres influences ou des inspirations venant des grands illustrateurs ?

S.R. : Pour mes influences, ce sont celles de mon enfance. C’est Dragon Ball avec Akira Toriyama, Togashi (Hunter X Hunter et Yuyu Hakusho). Après, il y a aussi ce côté assez poétique que j’aime beaucoup dans les œuvres d’Amano (les musiques de Final Fantasy). Une autre influence que j’ai eue c’est Sonic, surtout au niveau de Tails avec ses moustaches qui ressemblent un peu à celles de Chado le héros de Shiness. Il y en a sûrement d’autres que j’aime mais que je n’ai pas forcément en tête. (NDLR : c’est vrai que le héros de Shiness a un petit air de Tails – S.R. est un grand fan!)

Gamingway : Il n’y a pas eu d’influence occidental du genre Gimenez, Cabral, Lockwood ou autre ?

S.R. : Il y a eu une influence d’Astérix. En fait, village du héros ressemble beaucoup au village gaulois mais un peu plus transformé steampunk et il fait apparaître une sorte de menhir sur son dos. On me l’a rappelé et c’est vrai que j’ai beaucoup aimé Astérix quand j’étais gamin et on m’a dit : « Tiens, cela me fait beaucoup penser à Astérix » mais même moi, je ne l’avais pas remarqué.
H.H. : On pourrait croire que c’est une réinvention totale qui mélange un peu tous les genres.

S.R. : Comme l’univers a été créé quand j’étais gamin, tout s’est fait très natuellement. Je ne me suis pas du tout dit « Tiens, je vais recopier ça, cela rendrait bien ». En fait, j’ai beaucoup absorbé et maintenant, avec mon style graphique qui commence à être beaucoup moins amateur, surtout que je suis beaucoup aidé donc on essaie d’avoir quelquechose de plutôt carré, c’est maintenant que je prends conscience de mes influences.

Gamingway : Vous n’avez pas eu d’influence venant des RPG papiers ?

S.R. : Non pas spécialement.

Gamingway : Pour l’adaptation, avez- vous rencontré des difficultés, des contraintes imprévues ? Avez-vous dû revoir vos ambitions à la baisse ?

S.R. : Pour la partie graphique, quand on fait un personnage manga on ne se pose pas la question des différents angles de vue. Certains coupes de face sont les mêmes que de côté. C’est très compliqué à interpréter en 3D. Un bon exemple c’est Sangoku : il a toujours les mèches de la même façon, 4 à gauche, 4 à droite, que ce soit de face, de dos ou de côté. Pour le réadapter en 3D c’est très très compliqué et les artistes 3D en bavent pas mal.

H.H. : Il faut vraiment réinventer le personnage pour qu’il soit adapté en 3D. On ne le voit jamais sous cette forme-là dans le manga (ndlr : on parle de la version papier). C’est très caricaturé au niveau du dessin et le chara-design est très difficile à respecter en 3D. Ensuite, pour tout ce qui est technique, comme on utilise un moteur assez évolué qui est l’Engine Unreal 3, la première difficulté a été d’aborder le moteur, ce qui n’est pas évident. Encore aujourd’hui, on découvre des choses dessus. Du coup, on a commencé le développement en pensant être dans la bnne direction, puis on s’est rendu compte qu’on aurait pu faire plus simplement et de manière plus optimisée, plus stable, avec moins de bogues. Du coup, on n’a pas vraiment revu à la baisse mais plutôt à la hausse certaines fonctionnalité au niveau du gameplay ou autre. Le souci, c’est qu’on a eu un développement plutôt bancal et on a dû souvent revenir sur ce qu’on avait fait.

S.R. : Parce qu’on a évolué et qu’on a appris à utiliser ce moteur, on voit d’anciens détails qui nécessitent d’être refaits actuellement.

H.H. : C’est clair qu’il y a des choses qu’on ne peut pas laisser passer. On se dit : cela doit être fait comme ça, on ne peut pas le laisser tel qu’on l’avait fait il y a un an.

Gamingway : Shiness est un jeu PC en téléchargement. C’est parce que c’était plus facile comme plate-forme ?

H.H. : Ce n’est pas vraiment facile. Démarcher des éditeurs est loin d’être évident. Il faut préparer des dossiers, il y a toute une phase de préparation pour pouvoir attérir éventuellement sur console. Nous, c’est ce qu’on aimerait beaucoup. Le gameplay est d’ailleurs taillé pour une manette. Cela peut se jouer au clavier et à la souris, mais ce serait mieux sur console.

Gamingway : N’importe quelle console, pas de préférence ?

H.H. : On nous a souvent dit qu’on avait un petit côté Nintendo dans ce qu’on fait, mais nous n’avons pas de préférence particulière.

Gamingway : Le jeu n’est pas adapté à un format à un format portable ?

H.H. : Non. On y pense pour des projets futurs, toujours liés à Shiness. On aimerait faire d’autres jeux liés à Shiness, mais pas simplement des jeux qu’on fait indépendamment. Cela peut être un jeu qui va interagir avec le jeu Shiness. C’est comme une extension, mais sur portable.

S.R. : Pour rebondir sur la BD, c’est un peu le même principe. Ce sont les même points clés qu’on retrouve, mais racontés différement. On peut suivre un personnage qu’on ne suit pas du tout dans le jeu vidéo, les deux sont complémentaires. Dans le jeu vidéo, on peut résoudre des énigmes annexes, qui ne sont pas bloquantes dans le jeu, si on a lu la bande dessinée. Il y a un personnage qu’on peut voir très rapidement dans la BD et se dire « Tiens, j’ai joué avec, je le connais très bien ». Cela se complète.

H.H. : On attend de voir comment le jeu va être accueilli par le public, et surtout d’avoir des kits de développement pour les consoles next-gen, avant d’envisager d’autres projets. Pour une société comme la notre, toujours en cours de création, c’est très difficile. On est en incubation dans le Nord-Pas-de-Calais, à Plaine Image, on a un accompagnement par la région, on a des locaux, tout ce qu’il faut mais on n’a pas encore la possibilité de se dire « On veut tel type de développement sur telle console ». Le PC nous a un peu été imposé dès le départ.

Gamingway : Une société lilloise qui veut surprendre avec un RPG original, cela rappelle fortement Ankama. On a dû vous le sortir souvent. Cela vous flatte, énerve, ou n’a rien à voir ?

S.R. & H.H. : Non, cela ne nous énerve pas en fait. On trouve ça plutôt flatteur. C’est une belle success story, Ankama. Nous dire qu’on sera leur prochain successeur, cela va même nous amuser. On fait les choses très humblement. Nous dire des choses comme ça, cela va même nous mettre une pression qui n’a pas lieu d’être. On n’a pas l’idée de se dire qu’on est concurrent. On est de la même génération, donc on a eu les mêmes influences : c’est normal que ce qu’on fait se ressemble.

Gamingway : C’est la même ville, c’est le même genre, le même style…

H.H. : En fait c’est complètement par hasard car je ne suis pas du Nord. Moi je suis de région parisienne et Samir du Nord et on s’est rencontré il y a quelques années. On est de la génération Club Dorothée, on a les mêmes origines manga, dessins animés, jeux vidéo. On n’aime que ça et si on doit faire un jeu vidéo, on doit le faire sur ça. On dit souvent qu’on paraît Ankama, mais cela n’a rien à voir.

Gamingway : Ankama ne vous a jamais contacté ?

H.H. et S.R. : De toute façon, cela ne nous aurait pas intéressé dans la mesure où on n’a pas envie de faire du Ankama. Nous, on a envie de faire du Enigami, d’avoir notre style. On ne veut ni plagier, ni copier, ni être en concurrence. On a envie de faire notre vie d’un côté, et Ankama d’un autre : on fait de la 3D ils font de la 2D par exemple. Cela peut être le même public car le public qui achète les produits Ankama est un public qui aime les mangas. Je pense que ce public peut jouer aussi bien aux jeux Ankama qu’aux jeux Enigami. C’est toujours embêtant de nous comparer car on n’a pas les moyens financiers d’Ankama. Comme on est voisin on ne voudrait pas créer de malentendu. On monte de notre côté : on est invité sur scène à Japan Expo et on est flâté. On réalise que c’est beaucoup d’énergie, que c’est très difficile de se lancer dans le jeu vidéo et rien que pour ça nous on salue Ankama pour le succès qu’ils ont eu. Ils ont énormément de mérite et on admire leur travail, c’est un très bon exemple.

Gamingway : Pour les musiques et bruitages du jeu, avez-vous eu des influences particulières ou les mêmes que pour le reste du jeu ?

H.H. : Pour les musiques c’est moi aussi qui m’en occupe. Mes influences sont surtout liées à tout ce qui est RPG et animés japonais. J’écoute énormément d’OST de jeux vidéo et d’animés, tous les jours et cela m’influence énormément. Dans Shiness j’essaie de faire quelquechose d’épique tout en gardant un côté mignon, de créer cette petite alchimie qui fait qu’on est dans l’originalité. Pour les bruitages, ce sont les sound designers de notre équipe qui s’en occupent. Eux n’ont pas d’influence particulière : ils ont des références qu’on leur impose. Ils n’ont pas forcément les mêmes goûts et influences que nous donc on leur impose les nôtres. Quand il s’agit de faire une scène de combat dans un shônen, évidemment on ne va pas leur dire de regarder Dallas mais d’aller écouter les bruitages de Dragon Ball, Naruto, One Piece. Pour les voix, on a un très beau casting de doubleurs très talentueux qui sont encore à l’école à Paris. Ils sont encore étudiants, ils apportent vraiment une valeur ajoutée. On a trouvé les voix de nos personnages et on est très content. Dans Shiness, il n’y a pas de langage existant, c’est-à-dire que nos personnages ne sont pas doublés en anglais, en français etc. On a inventé une langue, et pour ça on a une cellule linguiste qui travaille depuis 6 mois sur une langue avec un vrai vocabulaire, un lexique et les doubleurs vont suivre ce lexique.

Gamingway : Avez-vous des objectifs à court terme ? Moyen terme ? Long terme ?

H.H. : A court terme on aimerait sortir l’épisode 1 avant la fin de l’année. Je rappelle par ailleurs que c’est un jeu par épisode.

S.R. : A plus court terme on aimerait sortir le site car on aimerait faire participer la communauté, fédérer le plus de gens à ce qu’on fait.

H.H. : On n’a jamais pris le temps de bosser sur notre communication., avoir un « community manager » C’est notre premier objectif dans un très court terme mais il est lié à la sortie de l’épisode 1 : on aimerait créer une communauté pour que le jeu ait le meilleur accueil possible à sa sortie. Ensuite, on aimerait créer la société de manière réelle, avec des salaires à partir des ventes de l’épisode 2 car l’épisode 1 sera gratuit.

Gamingway : C’est une bonne chose ça qui, on l’espère vous fera connaître. On vous souhaite beaucoup de succès et bonne chance pour la suite.

Retrouvez Shiness sur Facebook : https://www.facebook.com/pages/Shiness/114544665303360

Et bientôt sur son site officiel : http://www.shiness.fr/website

Comme nous n’avons pas de jolie photo des interviewés, voici donc la vidéo de l’interview :

(désolé pour la faible qualité, cette vidéo n’était pas censée être diffusée mais juste servir pour prendre des notes)

Interview réalisée par Enguy – Japan Expo (Juillet 2013)

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